Derenworld News : VII-5217

4 octobre 2009 par Kazz → Atlas

Le Canal d’Osport, prochaine crise internationale ?

La création d’un canal traversant le Farxel à Osport cristallise les tensions internationales. La République Maritime d’Avros y est fermement hostile, pour d’évidentes raisons commerciales : amoindrissement du trafic maritime contournant le sous-continent de Tangut et faisant escale dans ses ports. Concrètement, le canal détournerait au profit du Farxel une part qui pourrait dépasser la moitié du trafic maritime international passant actuellement par Avros ou le Tangut. Il s’agit principalement de fret lourd et durable : liquides, céréales, métaux, bois, laine, sel, outillages. Les fourrures, les épices, les tissus, peaux, cuirs, animaux, produits alimentaires, verreries ou poteries empruntent de préférence les routes terrestres.
Avec Avros se trouvent donc les principales cités de Tangut qui partagent le même intérêt : Tarantis, Starstone, Valonne, Viris. Le Thûzzland n’est pas content non plus : ce canal renverserait son rapport traditionnel avec le Farxel, plus ou moins obligé de passer par lui pour son commerce avec le reste du continent.
En face, un Farxel qui deviendrait le pivot commercial du sud-est de Derenworld mais hésite un peu, quoique assuré du soutien de l’Empire et de l’I.T.G., prête à financer une grande partie des travaux.

Le type de trafic maritime en jeu est à l’origine historique de la richesse d’Avros mais il ne représente plus aujourd’hui qu’un petit cinquième du commerce marchand de la République. L’essentiel de ce commerce s’opère en effet à destination ou depuis les ports de la République. La survie économique d’Avros n’apparaît donc nullement menacée par le projet Farxlan mais ce dernier pourrait quand même lui faire perdre un dixième de ses revenus.
Avros a donc récemment indiqué au Gouvernement du Farxel que la construction de ce canal serait considérée par elle comme un acte d’hostilité. Cependant, ce problème masque sans doute une tension de bien plus vaste ampleur. Pour la comprendre, une rapide analyse des grands mouvements politiques des dernières années est nécessaire.

Le déclin du Vizan depuis deux décennies, la disparition des Lich-Kings, l’affaiblissement de la Great Anarchy ont dégagé bien du terrain et donné le signal d’une certaine détente. Ce qui a permis ou favorisé la réunification du Farxel, la constitution du Royaume Confédéré d’Evriand étendu à la moitié de l’ex-Confédération et son tandem avec le Wejlar, l’émergence d’une Ligue autour de Zevjapuhr regroupant des contrées relevant pourtant de nations très diverses (Empire, Lowenland, Vizan, Okhpuhr, Isenheim). Plus généralement une ère de reconstruction et de prospérité, déjà engagée auparavant pour des pays comme l’Empire, le Farxel ou Zevjapuhr, s’est largement développée.
Les grands gagnants de ces mouvements sont le Farxel, l’Evriand et le Wejlar, la Ligue, et surtout l’Empire. Marn, le Lowenland. Plusieurs royaumes elfes (Dere, Vynar) ou nains (Krynn, Holderin, Zeel) en ont aussi profité.

A cette stade quelques constats s’imposent :
– Ces bénéficiaires cohabitent très bien ensemble ; ils sont soit alliés soit en bonne intelligence. Cette masse d’alliés ou de coordinations forme une sorte de grande Entente avouée ou de fait qui représente près des deux tiers des terres civilisées et du commerce mondial.
– L’Empire en est au centre géographiquement comme politiquement. La bonne intelligence entre ces pays est en bonne partie l’œuvre de sa diplomatie. L’Empire a directement ou indirectement soutenu le R.C.E., le Farxel, le Wejlar, la Ligue.
– A l’exception du Farxel tous ces pays appartiennent à la moitié occidentale de Derenworld. L’Empire a certes 50% de sont territoire dans l’est du continent mais c’est justement la partie où il est confronté à des difficultés.

Toutefois, cette Entente a ses adversaires, ses laissés pour compte, ses rivaux.
Les adversaires sont rares, bien connus et fort mal en point : la Great Anarchy est très en retrait et affaiblie ; le Vizan empêtré dans des problèmes internes est un pays malade, devenu une puissance de second ordre. A part eux, aucun élément politique de nature à menacer l’Entente n’émerge.

Les laissés pour compte sont bien plus nombreux.
Il y a d’abord le problème lancinant de l’Arkandahr. En déshérence depuis des décennies, ce pays, de peuplement disparate et qui a toujours été politiquement fragile, est un mélange d’annexe de la Great Anarchy ou du Bervikelt, de tribus autonomes rarement humaines et plus rarement encore good-aligned, de fiefs et de quelques villes qui se défendent tant bien que mal contre des raids, rançons et pillages récurrents. Seule la partie sud de l’Arkandahr, formée du Royaume des Nains de Norhazâd, de l’antique royaume Elfe d’Ariandor, et de la Cité Libre d’Ariacandre, présente une certaine sécurité et prospérité. L’Empire complète cette bande de civilisation en assumant la défense de Hillbrek, traditionnelle porte méridionale de l’Arkandahr.
Mais une bonne part du nord-est de l’Empire est aussi une terre un peu laissée pour compte. La Nevaïn forme une sorte de frontière. A partir de 20 ou 30 lieues au nord de ce fleuve commence une zone qui peut est d’abord nomade, en partie contrôlée par des peuplades alliées ou fidèles Ilnaëmb, puis formée d’immenses fiefs qui jouissent en pratique d’une très large autonomie. Or ces contrées n’ont pas gagné (ni perdu il est vrai) grand-chose par les évolutions récentes de Derenworld. La plupart demeurent des zones plus ou moins exploitées, souvent livrées à des bandits, des humanoïdes. Seule la partie côtière jusqu’à Gorlech y compris demeure sous la férule et la sécurité impériale.

Le Tangut est un autre laissé pour compte, ce qui est une tradition de cette contrée. Cela peut aussi sembler géographiquement logique : le Tangut représente une énorme masse territoriale fort éloignée des pays de l’Entente. Néanmoins, l’affaiblissement du Vizan, qu’il s’agisse d’une finalité ou d’une conséquence de l’Entente, n’est pas forcément une bonne nouvelle pour le Tangut. En effet, le Vizan défendait ou assurait un certain ordre dans la partie occidentale de ce sous-continent, surtout sur les mers, mission que le Farxel n’est pas en état et n’a pas la volonté d’assumer à sa place. Avros n’a sans doute pas les moyens humains de remplacer le Vizan et sans doute pas la possibilité politique de le faire, comme on le verra plus bas.
Un autre laissé pour compte s’appelle Mulgorge. Pourtant, si le pays souffre d’un ordre social particulièrement dur et peu sympathique, il prospère économiquement et, plus surprenant, culturellement. La tradition multiraciale a ici pris une connotation bien particulière, mêlant les humanoïdes et notamment les orcs aux humains. Le pays bénéficie beaucoup de la prospérité économique qui l’environne. Mais, politiquement, ce décombre des Lich-Kings est livré à lui-même. Certes il le revendique et en est fier. Environné de puissances qui lui sont toutes hostiles à l’exception du minuscule Osmark à son sud-est, il apparaît probable que Mulgorge développe un ressentiment qui n’aie plus rien à voir avec son origine Lich-King et où l’on retrouve la traditionnelle défiance des Variks envers les autres peuples de Derenworld.

Mulgorge est un peu emblématique de situations dans lesquelles se trouvent beaucoup de ses voisins. Comment qualifier la situation des restes de l’ex-Confédération du Mirbaïc, du Havener, de Portown ou de leur grand voisin Marn ? Gagnants économiquement, ils sont perdants diplomatiquement. Leur sécurité est assurée de fait par l’Entente, mais au prix d’un couteau sous la gorge qui n’est pas toujours seulement implicite. Ces pays ne disposent pratiquement d’aucune marge de manoeuvre politique. A terme, des frustrations peuvent en résulter.

Les rivaux
On pourra citer le Bervikelt qui, culturellement, s’oppose à l’Entente, et le Thûzzland que l’étroite coordination Farxel Unifié – Empire gêne politiquement et économiquement. Ces deux pays ne menacent pas l’Entente mais ne tirent pas d’elle leur prospérité ou leur sécurité.
En fait, le principal rival s’appelle la République Maritime d’Avros. Avros seule contre le reste du monde : tel est le climat qui semble s’instaurer depuis quelques mois. La République tire sa puissance du contrôle des mers orientales et sud-orientales, Elle vit du commerce, notamment avec le Tangut. Au plan militaire c’est de facto une île.

Avros représente le seul élément politique sur lequel l’Entente n’aie aucune prise. Les marchands avrossians négocient dans le monde entier. Ils sont attachés à des idéaux d’indépendance, de démocratie, de décentralisation, de libertés civiques et commerciales. C’est sur Derenworld tout entier qu’Avros a jeté son ancre ! fulminait Olan VII de Wejlar il y a déjà quelques siècles en constatant que Portown devenait une République Maritime située à des milliers de kilomètres d’Avros mais à quelques centaines de sa capitale. Avros est aujourd’hui comme depuis longtemps inexpugnable, extrêmement riche, et fort influente.

L’affaiblissement ou la réduction d’Avros et de ses correspondants ou alliés semblent être devenus l’objectif de plusieurs diplomaties. Toutefois la République demeure extrêmement populaire dans bien des endroits. D’autre part beaucoup seraient tentés d’y voir le signal d’une bascule de la politique impériale et de ses amis ou alliés vers un impérialisme dans le pire sens du terme. Les peuples d’Arkandahr ou d’Eriendel verraient assez mal l’Empire financer une guerre maritime pendant qu’ils servent d’amortisseur à sa frontière nord-est. Mirba, Haven, Portown ou le Lowenland ne comprendraient pas qu’un pays qui n’a jamais attaqué ni l’Empire ni le Farxel et qui contribue aussi à la défense de l’Arkandahr ou à la protection du Tangut devienne la cible diplomatique numéro un des grands de ce monde.

L’affaire du canal d’Osport n’est donc en réalité ni anodine, ni régionale. Il existe une convergence d’intérêts autour d’Avros où l’on pourrait retrouver Bervikelt, le Thûzzland, maintes cités de Tangut, et pourquoi pas le Vizan. L’Empire aura-t-il réellement la volonté de soutenir le Farxel si l’opération entraînait un risque de conflit ? Quelle serait l’attitude de Dere, de l’Ariandor, du R.C.E. ou de Zevjapuhr face à la politique d’Ilnaëmb et de Qwellis ? Les laissés pour compte, les adversaires et les rivaux de l’entente y verront-ils l’occasion d’une revanche ?
Cette affaire pourrait donner le signal d’une inimitié durable entre deux camps, entre lesquels beaucoup devront choisir et ces choix pourraient bien en surprendre plus d’un.

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