Ost, légions et réserves de l’Empire Naëmbolt

22 septembre 2019 par Kazz → Atlas, Société

De l’ost aux légions

A l’origine, le devoir d’ost implique la fourniture gratuite par tout sujet de l’empereur d’un service d’armes d’une durée d’un mois par an, dû et commençant sur le lieu où l’ost est appelé. Compte tenu de la taille du territoire de l’Empire, cela pouvait entraîner qu’un habitant d’une extrémité de l’Empire doive préalablement voyager pendant une, deux voire trois semaines, certes aux frais de l’empereur, mais sans travailler, avant de rejoindre le lieu de réunion, puis effectuer un trajet de même durée au retour. Afin de pallier ces inconvénients, il fut décidé que chaque province impériale fixerait vingt semaines correspondantes aux indispensables travaux agricoles : moissons, semailles, labours, vendanges etc… pendant lesquelles le temps de voyage serait décompté du service d’ost, ce qui revenait à exempter les habitants régions les plus éloignées du lieu de réunion de l’ost. Pour rendre les choses plus compliquées, si au jour de son appel l’ost n’a pas été réuni durant les deux années précédentes, sa durée exigible passe à 40 jours et même à 60 jours en cas d’absence d’appel dans les cinq années précédentes. Enfin, l’empereur peut prolonger l’ost pour un mois, mais en payant alors une solde à chaque appelé, et de deux mois supplémentaires en payant une solde et demie.

Ce système complexe pouvant vite devenir très coûteux a conduit l’Empire à ne l’utiliser qu’en cas vraiment très exceptionnel et à le remplacer par une force permanente, appelée les Légions, dégagée des contraintes de concentration et de convocation et présentant tous les avantages d’une armée professionnelle : toujours entraînée, coordonnée et disponible. La permanence des Légions permet également de réaliser de substantielles économies puisqu’elles sont en garnison et entretenues sur le domaine impérial, qu’elles contribuent à rentabiliser, et qu’en contrepartie du gîte, du couvert, et de la prestation de nombreux services (habillement, hébergement, soins, fourniture et entretien de matériel…) elles sont chichement payées en dehors des périodes de guerre.

Les légions ont été critiquées de ce qu’elles transfèrent la défense du territoire directement à la Couronne, court-circuitant ainsi le lien féodal du devoir de protection du seigneur. Mais il a été justement observé que leur rôle ne consiste ni seulement ni principalement en la protection du territoire impérial mais en toute mission, y compris offensive, que voudra lui assigner le souverain. D’ailleurs, même si elles sont en général cantonnées dans un territoire précis en période de paix, elles sont utilisables et d’ailleurs utilisées en n’importe quel endroit du pays indépendamment de leur cantonnement habituel.
Avec le temps, les légions finirent par être acceptées de tous, étant observé qu’elles ne constituaient pas un substitut aux rôles des nobles et défenseurs locaux mais un complément de ceux-ci, dans un pays sujet à des fréquentes invasions. L’archétype de l’utilisation d’une légion à l’intérieur de l’Empire consiste à se porter au secours d’un baron qui résiste à une horde d’orcs et ogres en s’enfermant avec ses sujets dans son castel afin d’en briser le siège et de repousser l’envahisseur. Un soin particulier fut toujours mis par les commandants de légions à ne point empiéter en quoi que ce soit sur les prérogatives seigneuriales et à demeurer indépendantes de toutes formes de pouvoirs locaux, chacune demeurant une entité indépendante placée directement sous l’autorité de la couronne. Avec les années, le système des légions s’incorpora parfaitement à la société de l’Empire Naëmbolt au point d’en devenir une caractéristique réputée.

Emplacements usuels de garnison des actuelles légions de l’Empire (cliquer sur la carte pour l’agrandir)

Légions et légionnaires

Une légion typique comporte 3 régiments. Les engins de siège et services de secours sont centralisés à la légion qui dispose de son propre état major et de sa documentation.

Une légion est normalement organisée en trois régiments de 800 combattants (huit compagnies de cent hommes) : le premier de piquiers ou d’infanterie lourde, le deuxième d’infanterie lourde ou légère, le troisième de cavalerie ou d’archers. Elle comporte une compagnie supplémentaire d’archers si son troisième régiment est de cavalerie ou d’archers dans le cas inverse. Elle inclut une compagnie d’engins lourds et de siège, une compagnie du train et services, un groupe de reconnaissance et scouts, une compagnie des services hospitaliers, de ravitaillement et de secours, un service d’état-major avec sa propre garde.
Les régiments sont dotés également de leurs propres sections d’archers, de cavalerie, de messagers et de scouts, d’un service de train et d’une intendance.
Une légion aligne nominalement 2700 hommes au combat. Avec les ateliers, réserves, personnel de garnison, familles et prestataires de divers services etc… l’ensemble des personnes dépendant directement ou indirectement d’une légion dépasse largement les 10.000.

Un légionnaire s’engage pour 10, 15, 20 ou 25 ans. Le service ne peut dépasser au total trente ans. Il est interrompu par la mort, par la désertion, ou par l’invalidité constatée du légionnaire, survenant en général par infirmité ou par âge. Le légionnaire invalide ou ayant fait son temps est libéré avec un pécule proportionnel à son ancienneté, ses états de service, et sa famille. Ce pécule peut aussi prendre la forme en nature d’une terre ou d’une exploitation agricole ou commerçante.
Environ 1.500 ex-légionnaires sont ainsi libérés chaque année pour des occupations très diverses. Chaque Légion comporte une société d’entraide des anciens légionnaires qui s’occupe de leur reclassement et parfois de leur secours. Certains deviennent paysans, d’autres commerçants, ou encore chasseurs, bûcherons, pêcheurs ; beaucoup trouvent emploi au sein d’une milice locale ou citadine, ou encore d’un seigneur ; les meilleurs se voient souvent proposer de servir dans la réserve.

Chaque légion dispose d’une réserve destinée à compléter et renouveler son effectif. Cette réserve est encadrée par d’anciens légionnaires qui lui servent d’ossature et font surtout fonction de formateurs de futurs légionnaires. Beaucoup de gens désargentés virent dans la réserve un moyen d’assurer leur subsistance, la réserve offrant le gîte et la nourriture en échange du service dans ses rangs et durant le temps de celui-ci.

La polémique autour de la réserve légionnaire

Sous Nirag Ier puis Kermegg II la réserve des légions, auparavant un service de recrutement centralisé à son lieu de cantonnement, fut organisée et institutionnalisée sous forme de régiments portant le numéro de la légion qu’ils approvisionnent. Ce changement aboutit à tripler les effectifs des réserves, qui passèrent d’une moyenne de 330 combattants au nominal de 800 prévu par la norme impériale.

Cette institutionnalisation souleva la noblesse contre elle. En effet, il apparut rapidement que les régiments de réserve, censés ne servir que de réservoirs à hommes et de centre de formation et d’entraînement, étaient employés à des tâches de maintien de l’ordre intérieur à la demande du pouvoir central mais encore de guildes ou de villes, concurrençant ainsi directement les prérogatives nobiliaires. D’autre part il fut admis que les réservistes étaient exemptés de leur devoir de ban pendant leur service si ce dernier était consenti pour l’année. En asséchant ainsi les ressources en hommes d’armes des grands féodaux, la Couronne les privait de moyens militaires d’envergure, sauf à les financer sur leurs propres deniers, ce que seules les plus riches ou puissantes maisons pouvaient envisager.
Or le ban a le plus souvent la forme non pas d’un appel aux armes mais de corvées perçues par le seigneur (entendu ici comme s’agissant d’un noble féodal ou du chef d’une communauté d’hommes libres) : exploitation du domaine seigneurial, entretien du castel ou des équipements, services de toutes sortes, voire même contributions alimentaires. Dans de nombreux fiefs de petite taille ou peu peuplés ou exposés au danger, cette ressource est vitale pour l’économie du seigneur qui ne peut assurer par lui-même ou avec ses seuls serviteurs ou famille l’ensemble des tâches nécessaires à sa subsistance, à son entretien et au maintien en bon état des défenses du territoire. Cette réforme mettait en péril la survie de ces fiefs puisque rien ne peut remplacer le rôle du seigneur dans la protection immédiate du territoire, les réserves ou légions n’étant jamais suffisamment rapides pour répondre à une attaque dans les temps de celle-ci. Du coup, à l’échelon local, les initiatives de toutes sortes se multiplièrent pour interdire aux paysans ou aux chevaliers bannerets de servir dans la réserve sous peine de perdre leur contrats, concessions, droits aux bien communs etc… Dans certaines contrées, la réserve entraîna même la réapparition ou l’intensification du servage qui comporte une interdiction de quitter la terre seigneuriale empêchant tout service dans la réserve.

Finalement, sous Nirag III, Namrodd de Chanteveille fit édicter que le service dans la réserve ne dispensait pas du devoir ban sauf en période de guerre et que le nombre de réservistes d’un fief ne pourrait excéder le tiers de ses foyers sans l’assentiment du seigneur local. Cette mesure calma les esprits mais la professionnalisation des réserves, entreprise quelques années plus tard par Langwend Shereïn, raviva les ressentiments.
En, outre, sous le règne de Dandria Ière, il s’avère l’emploi des réserves à des tâches de maintien de l’ordre interne n’est plus une rareté, la réserve servant désormais autant à approvisionner la légion dont elle dépend qu’à assurer la sécurité dans le territoire assigné à cette légion, notamment celle des routes et voies de transport. Cette activité des réserves est toutefois souvent perçue comme le signe d’un interventionnisme étatique de plus en plus développé à l’échelon local qui soulève nombre d’inquiétudes.

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