Le culte du Très-Savant Thoth, vulgairement surnommé l’Omniscient, est peu suivi : il regroupe une minorité de savants qu’éloignent du monde des règles de silence et des études d’une difficulté qu’aucun autre culte n’impose. Ce culte éprouve ses adeptes en exigeant d’eux la même dissociation entre connaissance et divulgation, entre le savoir et l’action, que celles du dieu lui-même. Cette dissociation est pourtant un pilier non seulement du culte mais des sociétés des mortels et même des immortels. Thoth est en effet une divinité fondamentale, non seulement par son omniscience, mais parce qu’il a renoncé à ce qu’elle fasse de lui la créature suprême de l’univers.
Le Récit des Actes de Thoth se place entre la Genèse et l’histoire de l’Ellgebir avant qu’il ne devienne Derenworld. Assez répandu sous l’appellation impropre de Parabole de Thoth, il résulte de compilations et résumés d’ouvrages de vulgarisation émanant d’auteurs divers. Il retrace des aspects de l’histoire de la divinité dont l’importance est fondamentale tant pour son culte que le monde entier. Il provient partiellement de l’Epigenese, texte universellement admis comme sacré par tous les clergés de la théologie classique dont la déesse ou le dieu confère des pouvoirs.
Thoth 1 était et demeure le plus sage de tous les dieux. Plus que toute autre créature depuis les plus anciens temps il a cherché à analyser les mystères de l’Univers et pour cela recherché, suivi et appris les enseignements de Ptah. Il en est devenu le seul à comprendre les mécanismes et les lois qui forment tout ce qui est : univers, temps, mondes, vivants et morts. Car ce que Ptah sait, Thoth l’a compris ; ce que Ptah a inventé, Thoth l’a étudié ; ce que Ptah a construit, Thoth l’a appris. Et tout qu’il apprenait, étudiait, comprenait, ne faisait qu’accroître son émerveillement envers la perfection des lois de l’univers, la majesté ordonnatrice de ce qui fut, est, sera.
Advint un temps où les enseignements de Ptah cessèrent. Il ne fut plus nécessaire à Thoth d’explorer, d’analyser, de corréler, pour comprendre ou éclairer davantage : il suffisait d’invoquer les mécaniques primales du temps et de l’espace pour tout déduire exactement. Il avait atteint l’omniscience.
Ce lui fut sa plus grande exultation. Sa joie était aussi ineffable qu’inexplicable. Aucune créature divine ou mortelle ou immortelle ne l’éprouva jamais. Il faudrait imaginer le plus grand savant de l’histoire qui serait parvenu non seulement à élucider toutes les théories expliquant toutes choses et tous phénomènes, mais encore à en acquérir la parfaite maîtrise lui permettant de les utiliser à sa guise sans jamais rencontrer la moindre incohérence ou inexactitude.
Devenu l’Omniscient, Thoth surpassait tout autre dans la compréhension de l’Univers, même Bes, son géniteur, même Ptah le Grand Ordonnateur, même Arioch du Chaos, aussi ancien qu’eux 2 et resté proche de sa nature originelle. Thoth pouvait tout appréhender, déduire, prédire. Sa science et sa prescience furent précieuses et souvent décisives au cours des événements relatés dans la Genèse. Cela en fit le plus écouté de tous les dieux. Ses avis, avertissements et recommandations ont façonné l’Univers tel qu’il est et sa sagesse se mesurait à l’étendue de cet Univers.
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Or il advint qu’au terme des événements de la Genèse, il parut à Thoth égoïste de conserver pour lui seul la connaissance des mécanismes de son lumineux savoir et que le temps était venu de la partager. Il entreprit donc de s’en ouvrir aux autres dieux en leur proposant de s’entremettre afin qu’eux aussi soient bienheureusement éblouis comme lui-même l’avait été.
Mais à son grand étonnement, les autres dieux lui rirent au nez, le seigneur Râ le premier mais aussi le sage Osiris ou la tranquille Bast.
Cependant Athéna, bien que riant comme les autres, devina le désarroi de Thoth. Elle écouta son coeur et eut la bonté de lui expliquer cette attitude en le prenant à part.
« Tu es l’intelligence même, cher Thoth, et tes études t’on fait omniscient. Mais vois-tu que tu ne t’attendais pourtant pas à notre réaction ? Personne ne veut t’offenser mais il n’est pas fortuit que personne non plus n’ait suivi ton exemple. Comprendre et agir sont deux choses différentes. Tu as appris les lois de ce qui est et tu affirmes que tu les maîtrises mieux que tout autre ? Nous te croyons. Mais cela n’est que moitié de ce qui est, et seulement la moitié compréhensible, analysable, apprenable. Tu ignores l’autre moitié, qui échappe à ton omniscience et y échappera toujours. Cette moitié c’est tout ce qui n’est pas le savoir, tout ce qui agit sans que nous le comprenions ni le sachions. Tu prétends connaître toutes les lois qui déterminent tout et tu as raison. Mais tu ignores tout ce qui n’est pas déterminable. Nous tous sommes nés et agents du hasard et du chaos, y compris les plus stricts observants des mécaniques universelles, y compris toi-même et même moi qui pourtant prône la défense des lois au besoin par les armes. Et c’est heureux et nécessaire car sinon toute existence individuelle, vivante et pensante deviendrait inutile et sans intérêt. Sans la liberté de me déterminer, je ne suis plus qu’un résidu de ces mécaniques que tu connais et maîtrises à la perfection. Alors qu’ai je besoin de tout connaître, même si tu désires me faciliter la tâche ? Faire de toi mon professeur serait faire de moi ton élève : je n’y consens pas. La connaissance ne fait pas forcément le savoir qui est lui-même une chose différente de sa maîtrise qui est elle-même une toute autre chose que son utilisation. Je sais infiniment moins que toi et suis pourtant Athéna de la Sagesse qui incarne le caractère autant que la réflexion autant que la mesure. Cela vient de ce que je sais me sert et non l’inverse. L’univers peut bien fonctionner comme une mécanique depuis que Ptah a lié Kronos, mais il n’est pas réductible à cela. Xiombarg créant les Abysses est-elle une mécanique ? Ce qui t’a déterminé à étudier l’oeuvre de Ptah, le savais-tu au moment où tu l’as commencé ? Personne et pas même Ptah lui-même ne sait pourquoi et comment il a voulu et pu lier Kronos et ainsi fonder de l’univers. Tes études t’ont apporté l’omniscience des effets, pas celle des causes. »
Hors ses qualités de guerrière, Thoth n’estimait guère la jeune Athéna 3 qui lui venait d’assez maladroitement lui rappeler qu’elle prétendait incarner la sagesse sans avoir parcouru le millième du chemin d’études qu’il avait lui-même suivi. Et voilà que cette prétentieuse dédaignait son offre en riant ? Thoth en retira qu’il n’avait rien à apprendre aux autres dieux qui les intéressât réellement. Autant susciter l’intérêt d’un potier tournant un vase en lui expliquant la composition atomique de la glaise qu’il manipule. Il en fut déçu, se sentant isolé parmi ces dieux qui, pourtant, l’estimaient comme le plus savant d’entre eux ; mais il n’en fut point affligé car il avait d’autres perspectives car d’autres créatures peuplaient désormais l’univers.
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Thoth se tourna alors vers les humains afin d’entreprendre de leur enseigner les rudiments de sa science.
Les humains d’Egypte Celeste avaient été conçus dans le but de renforcer les dieux face à d’éventuelles menaces à venir, avant de devenir assez nombreux pour peupler les mondes habitables de l’univers. Cependant ils ignoraient tout de ces buts. Les dieux qui les protégeaient les voyaient en effet comme autant d’enfants fantasques et obéissants, prompts à servir et adorer leurs créateurs, sans jamais se demander ce qu’ils faisaient là. Les terres leur étaient fertiles, les animaux faciles, ils ne manquaient de rien et nulle calamité ne les atteignait jamais. Ceux vivants au pied de l’Olympe, souvent regroupés en petites cités, étaient les plus drôles et les plus intelligents, mais aussi les plus querelleurs entre eux. Leurs dieux en étaient fort proches , certains même très proches. Ceux d’Egypte Céleste vivaient plutôt en petites communautés ; ils étaient moins turbulents et plus posés, assidus au travail, mais aussi plus lents.
Thoth choisit pourtant ceux-là, car la connaissance peut s’avérer une source de souffrance que le travail et la lenteur peuvent éviter ou pallier.
En ces temps antiques Bast la mystérieuse, fille de Nout-Hathor, ne voyageait guère, préférant se prélasser dans la douce tiédeur de Râ ; aussi regarda-t-elle, silencieusement dubitative, Thoth rassembler des humains candidats à ses monts et merveilles intellectuels. Elle se confia à Geb, qui venait souvent s’asseoir près d’elle au retour de ses excursions, selon ce qu’en rapporte son clergé en ces termes : « Il a tort de les tirer de l’ignorance : ils y sont heureux. Nous leur avons donné l’insouciance pour suprême bénédiction. Le temps de la leur ôter n’est pas venu. Apprendre oblige à mesurer ce qu’on ignore et alors on a peur. Inquiétudes et soucis viennent toujours trop tôt et souvent plus vite qu’ils ne s’en vont. Il ne devrait pas les exposer à cela, même par bonne volonté. Ces humains ne lui ont rien demandé, justement parce que nous les avons fait ainsi. »
Cependant d’autres inconvénients se révélèrent assez vite et contrarièrent Thoth. D’abord, les humains étaient déjà devenus trop nombreux pour que tous puissent tous l’entendre ou même un nombre suffisant pour que ceux-là éclairent ensuite les autres. Ensuite, l’esprit humain n’est pas celui d’un dieu : il oublie, se trompe, comprend insuffisamment ou imparfaitement, manque de la puissance d’attention ou de concentration ou de la constance requise. Enfin et surtout, ces esprits humains s’avéraient fort disparates selon les personnalités, âges, ou capacités de chacun ; certains s’intéressaient sans comprendre, d’autres auraient pu comprendre mais ne s’efforçaient pas, et il y en avait même qui ne paraissaient aux leçons divines que pour pouvoir se targuer d’y avoir été.
Cela mécontentait Thoth qui espérait de ses premiers élèves qu’ils devinssent les professeurs de leurs congénères ; cette espérance s’effondra lorsqu’il lui apparut que leur intelligence n’impliquait nullement quelque envie ou talent de pédagogue envers leurs semblables. Or restreindre ses leçons à un cénacle d’élite ne le satisfaisait pas car cela eût ruiné à son ambition qui était d’éclairer toute l’humanité.
Alors Thoth inventa et fit don aux êtres humains de l’écriture : il prit les signes, les dessins, les illustrations et les transforma en représentation fixe du langage qu’il enseigna à ses élèves.4
Ce fut un succès ; non un triomphe, mais un succès. Les enseignements de Thoth furent désormais gravés puis inscrits, ce qui supprima les erreurs ou les manques de mémoire de ses étudiants, lesquels devinrent meilleurs et plus nombreux. Mais pour les autres, il fallait désormais apprendre à lire sinon écrire afin d’accéder au savoir divin. Il leur fallait donc venir jusqu’aux stèles, obélisques, murs hiéroglyphiques, ou accéder aux rouleaux ou tablettes, trouver quelque lettré professeur qui leur apprendrait à les lire, et enfin réussir à mémoriser et maîtriser cet enseignement, tout cela avant de découvrir une divine parole qu’ils pouvaient tout aussi bien entendre de celui qui la leur lirait. Certains consentirent à ces efforts, la plupart s’en abstinrent. Car le nombre des humains sert tout autant à pallier la diversité de leurs imperfections qu’à la maintenir.
Il se développa ainsi une caste des lettrés de Thoth, qui formèrent les premiers savants de l’humanité. Parmi eux apparurent les premiers scribes, auteurs des premiers écrits qui sont des livres de lois, de science et surtout d’élégie envers celui auquel ils devaient et le savoir et le moyen de le transmettre.
Thoth fut intensément satisfait de ces parutions. Ces premiers textes représentaient la réalisation idéale de son ambition. Des ouvrages simples, limités à ce que pouvaient comprendre des esprits encore peu cultivés : de l’arithmétique, de la grammaire, de la géologie ou de l’astronomie élémentaire, les lois définissant les bases essentielles au fonctionnement d’une société de mortels, et ces glorifications gravées dans le marbre comme autant de récompenses à son entreprise et d’hommages à sa divinité.
Le Don de l’Ecriture représentait alors en effet un triomphe de l’Exactitude, concept crucial de l’omniscience de Thoth qui procède de déductions exactes des lois de l’univers. Exactitude du signifiant, les mots étant fixés et non substituables par erreur, paresse ou oubli, et reproduisant exactement et à jamais le divin dire. Exactitude du signifié, l’assemblage des mots correspondant exactement à l’exacte vérité énoncée par le même divin dire.
Il se dégageait de cette double exactitude une telle puissance que les humains les plus férus d’écriture en vinrent bientôt à la considérer comme consubstantielle au divin : la divinité de Thoth fut confondue avec son émanation confondue avec sa parole confondue avec l’écrit qui la manifeste. Le Dire divin devint alors un objet d’adoration d’autant plus puissante que partagée à l’identique par tous ceux capables de le déchiffrer et reproduire.
Thoth fut ému par ces adorateurs et décida de les gratifier car il lui paraissait injuste que les lettrés les plus acharnés ou les plus méritants, ceux qui frottaient avec persévérance leur intelligence à la parole divine ou qui œuvraient pour la répandre et la rendre intelligible auprès de leurs semblables, n’en tirent point de récompense. D’autant que sans cette récompense les imbéciles, les réfractaires ou les paresseux pourraient bien finir par déconsidérer ces vaillants lettrés à force de moquer leur éloignement des plaisirs de la vie pour quelques signes abscons que la langue et la mémoire de chacun remplacent tout aussi bien depuis la nuit des temps.
Ainsi vint-il à Thoth l’idée d’infuser de la magie dans le canal des élégies qui lui étaient adressées afin de conférer à ses lettrés priants ou zélateurs des pouvoirs surnaturels. Ce n’était pas entièrement une nouveauté : il n’était dès alors pas rare que telle divinité récompensât ses meilleurs serviteurs par l’octroi, presque toujours temporaire et limité, de capacités particulières. Mais Thoth fut celui par qui une prière codifiée et identique grâce à l’écrit devenait suffisante à l’octroi de ces pouvoirs. Il inventa et fut le premier à appliquer le processus permettant que la récitation d’un ensemble de mots rituels suffise à la transmission de capacités magiques par la divinité à laquelle ces mots et la pensée de celui qui les prononcent sont adressés. Il fut celui qui amena le Verbe à la hauteur de l’Acte. Ainsi pensait-il apporter la démonstration manifeste, irréfutable et matérielle de la supériorité du lettré sur les autres êtres.
C’est pourquoi il ne réalisa alors pas qu’il venait d’inventer en réalité la religion, dont le mot même découle de relier et de relire. Pas plus qu’il ne réalisa qu’il venait de rendre indéniable ce qu’on appelle le principe déiste, qui attribue aux dieux l’origine des mondes et celle des êtres qui les peuples et qui affirme la continuation de leur action sur ceux-ci. L’impiété, entendue comme l’incroyance envers les dieux, ne peut en effet prospérer qu’en l’absence durable de preuve de leur existence. Or Thoth venait d’offrir à la religion le moyen de fournir cette preuve irréfutable. Car il suffirait désormais à tout prêtre consacré de faire d’un geste apparaître de la lumière dans une pièce auparavant sombre pour réfuter et ridiculiser l’incroyant.
Mais Thoth ne pouvait percevoir tout cela car les humains n’étaient alors pas apparus et laissés à eux-mêmes dans des bas-mondes comme l’Ellgebir. L’univers et l’histoire n’en étaient pas encore là.
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Les autres dieux virent alors que Thoth pouvait faire de sa science un usage auquel eux-mêmes n’avaient pas songé. Certains en furent mécontents, d’autres jaloux, d’autres préoccupés, mais aucun n’y fut indifférent. Cependant, Thoth leur entreprit aussitôt, spontanément, de leur enseigner comment s’y prendre, car il ne recherchait pas la démonstration de la supériorité de son culte mais celle de l’écrit, à quoi était évidemment propice que tous autres cultes s’associent. Alors tous les dieux s’accordèrent pour considérer la trouvaille excellente et l’adoptèrent afin d’en faire bénéficier leurs propres priants et zélotes. Ils auraient donc été fort malvenus en reprochant à Thoth une invention dont ils approuvaient l’utilité pour eux-mêmes.
Mais ils n’en mesuraient pas moins le danger désormais représenté par l’Omniscient. Thoth avait étudié pendant des éons ; il était des dieux les plus intelligents et, de loin, le plus savant. S’il lui prenait d’employer son immense savoir de l’Univers au service d’actions sur celui-ci, alors son omniscience deviendrait une omnipotence à laquelle nul être ne pourrait s’opposer sauf, peut-être, Ptah ou Cthulhu.
Rien ne permet de considérer que Thoth nourrissait l’ambition d’une omnipotence s’imposant à l’Univers ; il ne paraissait même pas rechercher quelque gloire ou récompense et sans doute était-il bien trop savant pour ignorer que la vérité s’accommode mal de la vanité. Seul comptait pour lui l’émerveillement de la Connaissance et de l’Exactitude qu’il désirait répandre et transmettre, espérant partager le bonheur de cheminer depuis les vérités les plus élémentaires vers les plus profondes aussi bien que les plus triviales. Que les autres dieux aient adopté pour leurs propres clergés son invention de l’écriture, de la lecture et de la psalmodie suffisait à le rendre très heureux.
Néanmoins les dieux se divisèrent à ce propos car Thoth avait pour la première fois employé son infini savoir à inventer quelque chose à quoi eux-mêmes n’avaient jamais songé et dont beaucoup eussent été incapables. Cela posait forcément la question de son éventuelle omnipotence.
Certains répondaient que le passé de Thoth et son comportement plaidaient pour lui. N’avait-il pas été indispensable à vaincre les ennemis de l’univers, se montrant l’un des plus sages et fidèles descendants de Ptah ? N’avait-il pas partagé ses découvertes sitôt leur invention et de bonne grâce, avant même que cela lui soit demandé ? Omniscient depuis si longtemps, avait-il entrepris la moindre démarche, montré quelque volonté de régner sur l’Univers ?
Les autres considéraient que l’inexistence de cette tentation par le passé, à la supposer entière et réelle, ne préjugeait nullement qu’elle ne surgisse pas à l’avenir. Personne sauf Thoth ne pouvait être sujet à une éventualité aussi singulière et aussi puissante que l’omnipotence universelle : était-il raisonnable et prudent de ne confier qu’à lui la tâche d’y résister tout seul ? Quelque infini soit le savoir de Thoth, allait-il s’en protéger contre lui-même, contre la très-plausible tentation d’en user, contre ses envies, ses réactions et émotions, ses désirs ou ses craintes, sa propre irrationalité, et cela pour l’éternité ?
Au final, la parole du sage Osiris prévalut. Il rappela d’abord que si rien n’avait annoncé la survenance du phénomène devenu Kronos, rien ne l’avait non plus exclu. Puis il déclara : « Ptah a terminé le règne de Kronos sir l’univers et nous avons guerroyé contre ceux qui voulaient le reprendre pour eux-mêmes, tels Cthulhu ou Azathot. Aucun être ne peut affirmer qu’il ne se produira jamais un événement suscitant chez notre ami la même tentation et s’il y succombe, il sera alors trop tard pour l’éviter et nous devrons en affronter les conséquences. Cependant, nous serons d’autant moins enclins à déceler cet événement ou le changement de notre ami qu’il est précisément notre ami, il est des nôtres. Or nous voudrons conserver cette amitié par amour et par estime de lui. Et à l’inverse, le soupçonner d’une possible trahison, même sans le dire, même sans y penser, est déjà atteindre notre amitié. Nous ne devons ni ne pouvons permettre cette discorde. Voici ce que je vous propose ».
Tous les dieux, à l’exception de Ptah et des Grands Anciens, convinrent de la supériorité de l’omniscience de Thoth. Pas un n’y manqua, même les plus orgueilleux ou réfractaires, même le surpuissant Seigneur du Chaos et des Epées, même le suprême Seigneur des Âmes et de la Terre, même le très-haut Seigneur des Airs et des Ailés, même le radieux Seigneur régnant sur l’Egypte Céleste. Tous reconnurent son absolue de connaissance de l’Univers et qu’ils pouvaient apprendre de lui et qu’il pourrait accepter ou refuser de leur dispenser son savoir. Mais en échange de leur reconnaissance et afin que cette omniscience ne tourne jamais à l’omnipotence, il posèrent la condition que ce savoir resterait pur de toute utilisation par son détenteur, de tout emploi personnel comme de toute action ou influence matérielle. A l’avenir, la détention de l’omniscience se suffirait à elle-même comme à la béatitude du divin détenteur.
Thoth accepta ce qui est depuis appelé sa Renonciation. Il n’est pas dit ni de quelle manière ni quand. Les circonstances de la Renonciation et en particulier la motivation de la décision de Thoth sont l’un des plus grands mystères théologiques, qui fait l’objet de débats multiséculaires.
Certains tiennent que le dieu n’avait jamais eu quelque intention d’omnipotence et qu’il accepta aisément une concession que seule l’inquiétude d’autres dieux bien différents et plus ignorants que lui avait suscitée.
Certains considèrent à l’inverse que cette condition a été posée légitimement par les autres dieux après avoir réuni leurs sagesses dont le cumul, bien que différent de celle de Thoth, n’est pas moindre. Ils ajoutent que la convergence de divinités aussi disparates indique nécessairement que Thoth représentait une menace pour l’univers entier, qu’il le réalise ou non.
Une autre branche soutient que ce sont les autres dieux qui, en lui représentant la possibilité de son omnipotence, en ont suscité la tentation. Certains estiment que Thoth lui-même n’avait jamais ressenti cette tentation auparavant, ayant forcément utilisé ses connaissances puisqu’il ne pouvait en aller autrement mais ainsi que chaque dieu l’aurait fait à sa place et le faisait usuellement, sans excès ou démesure.
Il en est qui pensent que les autres dieux ont agi afin de susciter cette tentation ou de la révéler, parce qu’ils visaient en réalité à le mettre à l’épreuve et à le contraindre à afficher ses intentions. Certains estiment que Thoth a renoncé parce qu’il savait ne pouvoir affronter l’ensemble de l’Univers à lui seul. D’autres tiennent au contraire que Thoth aurait pu ne pas renoncer et s’imposer à l’Univers dont il serait devenu le Dieu Unique mais qu’agir ainsi eût été contraire à sa sagesse et à sa logique. D’autres encore penchent pour une médiation ou intervention secrète de Ptah auquel d’autres ajoutent Poséido, Râ, Hermès, Bes, Frigga ou Hadès….
Cependant pratiquement tous les théologiens se rejoignent pour admettre que la Renonciation de Thoth est fondatrice du principe du polythéisme. Ce qu’a refusé celui qui aurait pu contrôler l’Univers ne peut être admis de celui qui ne le pourrait pas. Si Thoth n’est pas devenu l’Unique, alors nul ne peut le devenir. Et s’il n’y a pas d’unicité, alors il y a multiplicité.
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Thoth quitta l’enseignement aux humains pour commencer d’enseigner aux autres dieux qui le voulaient. Certains se montrèrent vivement intéressés, en premier Gond, qui est parfois appelé Goibhnie ou Hephaïstos, Isis, Hecate, Diancecht, Hermès, Athéna, Balder et Oghma. A eux Thoth dévoila les mystères de la magie, les techniques de la médecine, les principes de l’architecture, les logiques de l’ingénierie, les ingrédients des arts dont ils tirèrent grand profit et parfois leurs domaines.
Mais même ces dieux ne montraient qu’un intérêt relatif ou ne disposaient que d’un temps trop parcimonieux à consacrer aux lois profondes qui régissent l’univers et aux systèmes intellectuels qui permettent de les comprendre. Même eux ne s’intéressaient qu’à tel aspect, processus ou loi qui leur serait utile en négligeant le reste. Aucun n’éprouvait d’aspiration à relier leurs connaissances parcellaires à une globalité transcendante. Quant aux autres, ils n’en avaient que faire ; ceux-là ne l’interrogeaient que pour des détails précis au sujet de faits triviaux dans des circonstances limitées.
Thoth réalisa alors que l’infinité de son savoir était aussi celle de sa prison intellectuelle. Aucune autre créature, aussi douée ou divine soit-elle, ne pourrait ni voudrait jamais percevoir ce qu’il percevait, éprouver ce qu’il éprouvait, sinon en une toute petite partie aussi peu représentative que le serait une simple allusion à quelque immensité dont on ne connaît en réalité rien. Bast, dont peu de divinités surpassent la capacité à se rendre exaspérante, le résuma en lui susurrant négligemment qu’elle admirait l’univers sans avoir pour cela besoin de le comprendre.
Cependant Thoth amusait Bes. Le Chanceux avait toujours nourri une particulière considération pour son rejeton devenu le sage étudiant de l’Univers, tel une sorte d’inverse de lui-même. Ce dieu Très-Antique était l’un des rares contemporains de Ptah, dont il avait approuvé et soutenu l’oeuvre. Grâce son origine et son ancienneté, la nature des mouvements de l’univers n’avait pour lui pas de mystère : il en était même une partie, presque une matière. Mais Bes s’amusait aussi que son rejeton appréhende cette nature en termes de lois et de mécanismes, d’intelligence et de savoir. Et, après tout, Thoth n’était-il pas aussi ce que les mortels auraient nommé sa descendance ? Certes, il était bien trop respectueux de ses propres créations pour éprouver quelque forme ou sens de devoir, d’autorité ou de sentiment paternel envers elles. Il lui suffisait amplement d’avoir offert à l’Univers une puissance comme Thoth, ainsi que l’industrieuse ressource des nains et bien sûr le prolifique grain d’incertitude de la Chance. Mais il avait simplement envie de faire quelque chose pour lui et l’envie de Bes ne doit jamais être contrariée, surtout par lui-même.
Bes vint alors à Thoth pour lui donner ce qui est appelé sa leçon, dans les termes rapportés ainsi que suit.
« Toute ta science, tout ce que tu as étudié et compris, tu l’as vérifié par tes observations. Or ce que observes, dès l’instant où en tires enseignement et par cet instant même, est aussitôt enfoui dans le passé. Seules ta mémoire et ton intelligence te représentent ensuite ton observation passée. Mais la représentation n’est pas la présentation, pas plus que le présent n’est le passé. Rien n’échappe au Lien de Kronos, pas même ta propre pensée.
Tu penses selon ce que tu as fixé et conservé en mémoire malgré le temps qui passe. C’est pourtant un artifice car rien n’échappe au temps et rien ne se produit sans lui. Toutes les lois que tu as comprises, tous tes souvenirs qui les démontrent, l’ensemble de tes déductions qu’on désigne par ton omniscience, tout cela a valeur d’enseignement, d’émerveillement, de sagesse, mais cela n’a plus rang de fait. Or pour toute chose ou créature, rien ne surpasse l’importance du fait.
Pour l’abeille qui s’approche d’une fleur, seul compte qu’elle parviendra à s’y poser sans encombre, seul compte qu’elle ne sera pas happée au passage par un oiseau prédateur, seul compte qu’elle trouvera assez de pollen sur cette fleur pour la butiner utilement et seul comptera ensuite le trajet qu’elle accomplira pour le ramener à la ruche. Sera, aura, parviendra, accomplira : rien ne compte que l’avenir. Or toute ton omniscience, Thoth, ne porte que sur le passé. Cette omniscience n’est donc qu’un fait aussi trivial que n’importe quel autre. C’est pourquoi les dieux la négligent : eux aussi, comme l’abeille, oeuvrent face à l’avenir et dans le présent. Et c’est pourquoi tout que tu contemples et dont tu tires félicité n’est pas ce qui se passe ou se passera, même si tu peux le déduire ou prédire. Seul le passé admet la certitude. »
Thoth se récria. Aussi appuyée sur le passé soit-elle, sa science s’appuyait sur des lois intangibles et certaines. De sorte que ses conseils étaient plus judicieux que tous autres, ainsi qu’il l’avait maintes fois prouvé, et de même que ses prédictions s’avéraient les plus solides. Et tout cela sur n’importe quel domaine ! Or tous les dieux alliés de Ptah n’en avaient-ils pas été les premiers bénéficiaires notamment pour vaincre leurs ennemis ?
« Personne ne le conteste. Mais conviens avec moi que tu viens précisément de m’entretenir de choses passées. Tu abordes le présent depuis le passé quand tous, dieux y compris, l’abordent depuis l’avenir. Tes avis et prédictions sont déductifs plutôt qu’intuitifs. Or chaque instant qui passe porte une infinité de faits qui te sont autant d’épreuves car, pour que ton omniscience demeure, il faut que chaque de ces faits soit conforme aux lois que tu as comprises, ou bien il te faut modifier ces lois afin qu’elles prennent en compte les faits qu’elles n’expliquent pas. T’en accommoder ne t’a pas été trop difficile jusqu’à maintenant car ce qui compte dans l’Univers n’a guère changé depuis que tu as acquis ton omniscience. Il n’en ira plus ainsi. La vie se répand. Les mortels vont croître et se multiplier. Les données de l’Univers ne seront plus réduites à des lois physiques, à des mécaniques temporelles, ou à quelques poignées de créatures immortelles. Permets moi une petite prédiction, pas bien difficile. Tu as bien fait de donner l’écriture aux mortels car tu vas devenir toi-même scribe. Pour maintenir le système nécessaire à ton omniscience, il va te falloir désormais collecter l’histoire de tout ce qui qui vit et cette charge va croître de façon exponentielle. Je serais toi, je commencerai dès maintenant à employer ta prodigieuse intelligence à résoudre cette difficulté au lieu de te désoler de tes différences avec tes divins collègues. »
Seul Bes le Très-Antique pouvait oser s’adresser en ces termes à l’Omniscient, comme d’ailleurs à n’importe quel dieu, et il ne s’en privait pas. Mais Thoth connaissait l’ancienneté de Bes et comprit que son créateur avait raison et lui en sut une profonde gratitude. Et il trouva rapidement la solution, qui était toutes les écritures, tous les langages, et toutes les magies, dont il connaissait toutes les lois et mécaniques. Il construisit aux confins de l’Egypte Céleste une immense pyramide qui s’étend avec le temps, où toutes les connaissances de tout ce qui advient entrent par la base avant de remonter en s’entrecroisant, s’assimilant, se mêlant ou infusant ou résistant aux précédentes pour former ou alimenter des systèmes ou des singularités de plus en plus rationnelles et simples vers le sommet où il demeure. Au coeur de cette pyramide s’élabore le Rouleau Infini où tout est écrit de ce qui est advenu et qu’il suffit de lire pour connaître la vérité que l’on recherche.
◇
Cependant les humains d’Ellgebir apprirent l’écriture par les prêtres qui la tenaient eux-mêmes de Thoth dont c’était l’invention. Toutefois les humains s’aperçurent rapidement que les elfes et même les nains possédaient eux aussi l’écriture qui, chez eux, n’était pas seulement sacrée mais accessible et utile à tout profane. Aussi l’écriture s’échappa-t-elle des temples pour devenir l’affaire de tout lettré ou de quiconque voulant en être un. Et comme cette situation recueillait l’assentiment des elfes et des dragons, alors gardiens du monde, aucun dieu ne pouvait y trouver à redire.
Mais Thoth, seul, en fut horrifié.
Car il s’avéra que l’écriture profane était employée à d’innombrables desseins chaque jour plus divers et différents. L’écrit continuait certes à promouvoir les enseignements divins et aussi à formuler et répandre des sciences utiles, des lois justes, des thèses exactes. Il pouvait être employé à des recherches intéressantes ou fructueuses, à exprimer la beauté des sentiments ou la précision des idées. Mais l’écrit pouvait désormais tout aussi bien servir à duper, à instiller ou persuader de l’erreur, à égarer vers l’inutile ou le faux, et même à blesser, heurter, à faire le mal, à semer le chaos et la discorde.
Loin de n’apporter aux humains que l’exactitude nécessaire aux élévations espérées par Thoth, l’écriture amplifiait aussi la diversité de leurs erreurs qu’elle renforçait de sa protection contre le temps et l’oubli. Il lui parut ainsi qu’au lieu de faire bon usage de cet outil magnifique, les humains le livraient à leurs fantaisies de pauvres mortels.
Ce qu’il percevait comme un immense gâchis le consterna immensément. Si les humains s’avéraient capables de mésuser à ce point d’un instrument aussi élémentaire que l’écriture, quel sort réserveraient-ils aux grandes révélations ultérieures qu’il avait l’intention de leur fournir ? Bes avait raison : le passé ne suffit pas à prédire l’avenir et Athéna aussi : détenir le savoir n’est pas le maîtriser.
Il comprit alors qu’il avait été stupide et vaniteux envers la déesse aux yeux pers dont il avait négligé les paroles en se croyant supérieur à elle et en prenant sa gaieté sincère pour de l’arrogance. Athéna était peut-être moins savante que lui mais certainement plus sage et de bien meilleur conseil qu’il ne l’avait été pour lui-même. Car il s’était montré aussi faillible que tout autre et son omniscience ne l’avait nullement protégé de ses faiblesses. Il en éprouva une nouvelle et désagréable sensation d’extrême embarras.
Face à cela, il n’avait pas d’autre solution que le silence, ultime et logique prolongation de sa Renonciation à agir. Il lui fallait donc renoncer aussi à sa généreuse ambition d’éclairer les vivants au sujet de l’Univers pour leur en offrir la compréhension et la beauté. A l’instar de leurs autres dieux, ces vivants ne voyaient pas l’intérêt de pallier la tristesse de leur condition mortelle par une approche intellectuelle des félicités divines. En quoi ils avaient peut-être bien raison car il n’était désormais plus en mesure d’affirmer le contraire : savoir n’est ni juger ni agir.
Thoth devint alors l’Omniscient Silencieux, celui qui sait tout et qui ne dit rien ainsi que le désignent les plaisantins. Il se fit économe de son savoir, de moins en moins enclin à révéler quoi que ce soit à quelque sujet que ce soit et de plus en plus énigmatique et secret à propos de tout et envers tous, y compris elfes et dragons, y compris les autres dieux, y compris ses propres prêtres et zélotes .
Il prit l’ibis pour animal sacré, symbole et représentation. Car l’ibis différencie le breuvage buvable de celui qui ne l’est pas, l’eau et le poison, le vrai et le faux, l’exactitude et l’erreur. Thoth est depuis dit threskiornicéphale : qui a la tête de l’ibis. Et depuis, dans le langage des dieux ptahins, où le suffixe « ni » est un cas possessif, le mot threskeia signifie religion. Car s’il existe des dieux de la magie, Thoth demeure pour l’éternité le créateur et gouverneur de toute magie religieuse.
Cependant l’écriture ne fut pas abandonnée des dieux, bien au contraire. Le savoir qu’elle permettait n’était pas un absolu qu’il fallait atteindre mais une ressource qu’il fallait employer, certains prônant même quelle le soit plus et le mieux possible, tels Gond, Hermès, Diancecht ou Athéna. D’autres, notamment Oghma, Balder, Freyya ou Osiris, considéraient que les usages décriés par Thoth comportaient au contraire leur propre valeur ou beauté et pouvaient éclairer les vivants par d’autres moyens que l’exactitude logique ou mathématique comme l’émotion, la philosophie ou le rire.
Ainsi le don de Thoth devint la chose de tous : immortels et mortels, lettrés ou prêtres, savants ou chansonniers, pendant que la connaissance infinie resterait la chose du seul Thoth. Ce qui s’exprime par la phrase rituelle du credo de son culte : «Je lis, sais et proclame seulement que seul Thoth est omniscient et dieu de cette omniscience et par cela ne peut ni ne veut rien en révéler. »
Cette phrase signifie que les vivants détiennent des parcelles de connaissances limitées qu’ils peuvent transmettre grâce au langage et fixer grâce à l’écriture que leur a donnée le dieu Thoth qui unit tous ces savoirs en une divine universalité mais ne peut agir ni même parler en conséquence. Elle implique alors que seuls les vivants mortels ou immortels ont l’emploi du savoir qui peut changer le monde et par contrecoup l’omniscience de Thoth.
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1 — Thoth est le nom usuel, probablement pas le sien à sa naissance, du dieu parfois appelé Djehouti par ses adeptes et prêtres, Twidj par les dieux, ou Khemenou par les mortels de certaines contrées.↑
2 — Sont considérés avec certitude comme les plus anciens des dieux, contemporains ou préexistants à la régulation de l’univers issue du lien de Kronos par Ptah : Bes, Arioch, Xiombarg, Nout et tous les Cthulhoïdes. Sont présumés l’être aussi Silvanus et Tezcatlipocla.↑
3 — Bien qu’à l’échelle des dieux et de la post-Genèse le temps ne soit pas mesuré, il y a tout lieu de considérer qu’Athéna est à peu près aussi âgée que Thoth, sinon seulement un peu moins.↑
4 — Il s’agit bien du Don de l’Ecriture et non de son invention, bien que le texte confonde parfois les deux. Les elfes (en d’autres plans) et les nains avaient inventé et développé l’écriture comme un outil auxiliaire pratique pour la correspondance, la technique, la poésie, le commerce, qui était réservé à leurs peuplades. Thoth offre l’écriture aux humains, qui ne la connaissent alors pas, comme un outil à la fois religieux et général de révélation de la vérité et surtout capable de transcender leur durée de vie.
D’autre part, le texte ne précise pas que l’alphabet hiéroglyphique utilisé par Thoth sera rapidement concurrencé par l’alphabet runique employé par les nains de l’Egypte Celeste. Ce dernier finira par s’imposer sur Derenworld sous une forme commune définitivement fixée en 3111, à laquelle ont contribué les clergés et les elfes, les hobbits, les nains et les humains Wejlans, Kelnes et Maurims. Néanmoins plusieurs peuples, par exemple les Naïgakis, Maztiis, Utumniens, continuaient alors et continueront ensuite d’employer des idéogrammes.↑