Une Histoire de l’Empire Naëmbolt – 4e partie

5 mars 2015 par Kazz → Atlas

Naëmbolts

(Chapitres 1 et 3 sur l’ancien site, ‘Encyclopédie > Pays & Contrées’ )
Cette version est reprise du site originel en incorporant des corrections mineures de noms et de date ou de mise en cohérence, quelques  légers ajouts ou retraits, et un peu de réécriture.
[Chapitre 2] [Chapitre 5] [Chapitre 6]

LE CATACLYSME

La Great Evil Coalition requérerait une histoire en elle-même. Elle a d’autant moins sa place ici qu’elle constitue pour l’Empire un phénomène absolument imprévu sinon imprévisible. Namrodd II n’a rien vu venir et ses ministres non plus. Par surcroît, on ne se rendra bien compte de la réalité et de l’étendue de la menace que lorsqu’il sera de beaucoup trop tard.
Tandis que les hordes du Bervikelt s’installent devant Ariacandre pour ce qui deviendra le Long Siège, tandis que l’Arkandahr s’effondre et que l’Eriendel envahi appelle Ilnaëmb au secours, l’Empire croit encore avoir affaire à une « poussée d’une étonnante vigueur » de la part de quelques barbares en mal de rapines. L’armée de secours qui part en Eriendel prend son temps et est ralentie par des foules de réfugiés qui se placent sous sa bienveillante protection. Mal équipée, mal préparée, elle ne réussit pas sa jonction avec ses alliés locaux, d’Ariandor et d’Eriendel et se fait battre séparément au nord de Rwandel. Mishkaïl d’Arwen se replie prudemment vers Orfajaz pendant que l’Empereur noue des contacts diplomatiques tout en hébergeant les rois Talgemund d’Eriendel et Jubal IV d’Arkandahr.
Pendant l’hiver qui suit, l’Empire envoie des renforts et prépare calmement, en toute confiance, sa campagne de libération de l’Eriendel et des confins du Silverdon vers Ariacandre. Mais au printemps, les digues cèdent ailleurs. Le Wejlar est envahi, les chevaliers de Prias enfoncés et tandis que le gros de l’armée impériale avance lentement en Eriendel, la IVe Légion, laissée quasi-seule pour défendre tout le nord de l’Empire, se fait pulvériser à Durfhill par l’armée de l’Orc-Warlord Borgpht qui, dans la continuité, met à sac Naù et menace Nordgaard. Dépêchées à la rescousse, les IIe et IIIe Légions sont contraintes de s’enfermer dans l’imprenable forteresse par la stratégie remarquable du légendaire Warlord des Orcs de la G.E.C..
En Eriendel, la libération du pays a bine commencé avec d’être arrêtée aux frontières de l’Ariandor ; là, ce ne sont pas des hordes de barbares mais d’ogres, de géants et même d’ettins qui repoussent l’armée du Maréchal Sorensen d’Eaglehunt. Dans le même temps, au centre de l’Empire, des bandes de monstres encadrées par des sorciers comme au temps des Héritiers d’Hornst déboulent via par le Comté de Naù et le Pellanore laissés sans défense par les Légions coincées dans Nordgaard et s’en vont semer la pagaille et la panique dans le HEart. D’autres apparaissent depuis les Central Barriers et mordent à pleines dents dans le « ventre » de l’Empire. Certaines ont traversé la Kelnessea pour débarquer sur les côtes du Middle Empire où ils terrorisent la populations, isolent les armées de leurs arrières et ravitaillements et menacent de couper le pays en deux. Contraint à la réaction, l’Empire assemble des réserves autour d’Ilnaëmb. Soit exactement ce qu’attendaient Borgpht et le War-Khan Hir Trollvak : pouvoir enfin situer le gros des forces impériales de réserves. Dès que celles-ci font mouvement, ils coordonnent les leurs depuis la Kelnessea et le siège de Nordgaard pour prendre à revers l’armée de réserve qui est anéantie en trois semaines de campagne.
Ailleurs, les armées gobelines du Toar mettent le siège devant Zevjapuhr, la Confédération est ravagée, le Farxel mobilisé par des hordes surgissant de ses montagnes, Avros harcelé par d’incessants débarquements. L’économie du monde entier entre en crise mais Namrodd n’a plus le loisir de s’en désoler car son pays est désormais effectivement coupé en deux par Trollvak. Au nord-est, les hordes Bervikelters et de géants font reculer les armées d’Eriendel et du Marécham d’EagleHunt. A l’ouest où Zevjapuhr et le Wejlar sont envahis, seul Marn résiste en procurant à l’Empire quelque répit. Mais au nord, l’armée du Warlord Borgpht n’a plus d’opposition et menace tout l’ouest d’un Empire qui n’a plus que deux Légions disponibles pour lui barrer la route. Pourtant, la Cour semble en complet décalage avec la situation. Tout va bien à Ilnaëmb, Orandreth, Isablis, ne dramatisons pas, il y a encore le temps, nous pourrions peut-être condescendre à solliciter l’aide du Roi des Thûzz ou du Calife de Vizan ?
Namrodd passe de l’indécision à la panique quand Merin XIV de Thûzzland lui explique poliment que sous terre, les nains ont fort à faire pour combattre l’équivalent en Drows et Duergars de ce qui a envahi certes l’Empire mais pas seulement lui. Le Naëmbolt ne comptera ni sur les Thûzz ni sur aucune autre tribu des Nains: tous se sont mobilisés depuis plusieurs mois et luttent ensemble. Inspirez-vous en pour vos affaires de surface !
Namrodd s’en va alors quémander du côté du Caliphe Liftipyge qui le reçoit, l’écoute poliment et lui promet de le revoir au printemps prochain en l’assurant que tout ça n’est pas si grave.
Au printemps, Newerton, Naù, Bellridge sont tombées, le Wejlar explose, l’Evriand est réduit à un quart de son territoire et la Confédération à Portown, Ithyl et Holderin. Au printemps, l’armée Niush bat l’armée d’EagleHunt à Storvenoï et s’ouvre la porte de tout l’est de l’Empire. Au printemps, le Vizan vole au secours de Zevjapuhr et non d’Ilnaëmb. Namrodd ne sait plus à qui demander de l’aide ; aux… Derans ?
Les désastres s’enchaînent pour tout le monde. Avros affronte des sahuagins coordonnés avec une nouvelle armée menée par le Yuan-ti Sisspish qui ravage le Tangut. Dilanovia est pillée de fond en comble et à moitié rasée par l’armée Niush. La Confédération subit des invasions d’orcs le jour et de morts-vivants la nuit. Pendant que l’armée Borgpht s’est portée sur Durfalls, l’armée Trollvak chasse toutes les armées de secours ou de réserve qu’elle défait l’une après l’autre. Le commandement militaire de l’Empire est totalement dépassé. L’état d’impréparation, voire d’incurie est flagrant. Les nobles tentent des résistances sporadiques dans leurs fiers mais c’est le chacun pour soi dans le combat comme dans les défaite qui s’enchainent. Et ça continue. Des renforts barbares, sous la conduite de Holghing, font tomber Rwandel puis Orfajaz puis foncent vers le sud en combinaison avec la Sorcière Iggwilv qui s’embarque audacieusement depuis le GaIko pour débarquer sur la côte nord du Tangut et s’offrir le Ghinor puis le Tarentine L’armée Niush occupe le centre à la place de l’armée Trollvak qui, renforcée et débarrassée de tout danger sérieux à l’est, se dirige désormais vers Ilnaëmb. L’Empire y a assemblé ses dernières forces : l’arrière-ban de l’Ost, tous les réguliers des régiments de réserve, les restes des VIe et XIIe Légions et les trois encore à peu près intactes: la Ie, la Ve et la XIVe. Trollvak fonce sur elles et, au dernier moment, passe au nord, contourne Ilnaëmb pour s’en aller tranquillement occuper le Heart déserté et terminer sa boucle par Isablis et le Sablern.
Namrodd a compris depuis longtemps qu’un plan d’ensemble a été ourdi. La Great Evil Coalition est d’ailleurs publiquement avérée. Elle se propose et se prépare à découper les pays humains, elfes et nains en tranches.
A partir de 4877, l’Empire cesse d’être une puissance. L’Etat n’existe plus. Si l’armée Holghing subit un échec devant Gorlech, c’est à la résistance locale, aux Druides et à leurs alliés qu’on le doit. D’ailleurs, encore une nouvelle armée d’orcs, celle-ci conduite par le général Gorgrodd, massacre les Stroels et assiège Gelkard sans que le Naëmbolt ait les moyens de s’y opposer. Dans l’est, les débris de VIII, X, et XIIIe Légions essayent de former un front entre Anequere et le Thûzzland.
Une armée Zok’r’Tio les déloge d’Anequere et de Bojontey qui tombent à un mois d’intervalle. Gorgrodd avance vers Blumwald, défait les restes d’une VIe Légion pour avoir envoyé de vains renforts un peu partout, et prend la ville. Marn, l’Okhpuhr et le Vizan offrent un pacte de non-agression à la G.E.C. et Marn en profite pour gagner quelques territoires sur l’Evriand pris à revers.
Certes Holging s’opère un débarquement en Farxel où il est aussitôt anéanti le 4 Virgo 5877 devant Haaker. Certes les Thûzz, le Ritterland, Avros forment un noyau d’Alliance auquel tous les nains de Derenworld prêtent immédiatement allégeance ; mais ce sont des nains, Merin XIV Thuzz’n Tar et Borim Tar-Thunderhold, qui sont l’âme de cette Alliance. Ils opèrent en Tangut et parviennent lors de la bataille de Hellgong à défaire l’armée Sissipish, infligeant à la G.E.C. un terrible revers/
Mais Namrodd s’en fiche : Isablis est tombée. Le coup est tel que l’Empereur n’y survit pas.

Irwin VII monte sur un trône qui ne signifie plus grand chose. On se croirait revenu aux premiers temps de l’Empire, avec ce Naëmbolt vacillant qu’on proclame Empereur de terres qu’il ne contrôle plus. Est-il vraiment plus qu’un roitelet, ce triste monarque d’une d’une ville envahie de réfugiés où l’on meurt chaque jour de faim, où la police impériale pend dix meurtriers et voleurs chaque matin quand elle devrait en attraper mille. Il reste le trésor impérial et Irwin VII se demande peut-être à quoi servent ces années de bénéfices entassés dans les coffres du Palais de l’Ailendil.
En Confédération, Ithyl est tombée aux mains de la G.E.C. L’Evriand est annexé par Marn. Faut-il aller s’avilir devant les vainqueurs du jour afin de s’allier à eux coûte que coûte ? Supplier par l’entremise de Marn ou du Vizan un strapontin dans la nouvelle alliance ? Ou se joindre en position de faible à l’Alliance des Thûzzs ?
Irwin VII prisonnier dans Ilnaëmb, n’a plus guère de frontière qu’avec Dere, via Henrys. Les Derans, le Lowenland et Vynarëa se contrefoutent de son sort et cela peut se comprendre. Mais ils font la même réponse à Luckshyn XI de Wejlar et cela se comprend moins ; les Wejlans en garderont longtemps le ressentiment. La G.E.C. a définitivement perdu le sud-est du continent. Mais à Sylph Island, le Vizan défait les forces navales d’Avros: apparemment, l’Alliance Naine n’ira pas plus loin.
Luckshyn propose alors à Irwin de demander directement à la G.E.C. ses conditions de paix. Nous sommes en 4881 et la G.E.C est maître de Derenworld. Le Wejlar et l’Empire ouvrent donc des négociations d’armistice avec elle : c’est la consécration du désastre. Cependant, après trois mois de pourparlers, le traité de partage du continent proposé par les hiérarques de la G.E.C. s’avère si inéquitable et imprécis que le Parlement d’Empire force Irwin VII à le repousser. Dès la nouvelle du refus, le Vizan jette le masque et entre en guerre contre l’Okhpuhr qu’il annexe en intégralité en trois mois. En Empire, la guerre a repris et après deux ans de siège Enlight tombe aux mains de Niush. L’étau se resserre de plus en plus autour du trône. Peu avant l’hiver, Biantey, regagnée quelques mois auparavant par Edjar Dwarvenstone, est reperdue et rasée par Holghing. Et en Taurus 4882, c’est l’armée du Calife qui monte vers Ilnaëmb.
Aussi, quand l’Arch-Mage Wengoll fait sa fameuse prophétie publique: la G.E.C. ne passera pas le millénaire. tout le monde le prend pour un fou.
Irwin VII n’est pas au courant. Il n’a aucune nouvelle des sept huitièmes de son pays. Durfalls, Nordgaard, Broke et Haldwarrow sont assiégées depuis l’intérieur alors qu’elles sont censées garder les frontières de l’Empire. Il n’a sauvé Corontown et Toende qu’en les cédant à Marn. De grandes villes impériales, il ne lui reste, outre sa capitale, que Henrys et Orandreth. Dans Ilnaëmb assiégée, on enterre plus de cinquante personnes chaque jour.
Qui ou quoi peut encore sauver l’Empire ? Pas l’Empereur: son extraordinaire suite de revers militaires s’explique par plusieurs causes mais elle n’a qu’une seule conséquence : l’impuissance de la Couronne. De l’or, oui, on en a; mais des soldats, des hommes ? Et comment les recruter, les faire venir ? Cela prendra trop de temps. Il faudrait un miracle. Un miracle comme, par exemple, Ariacandre qui tient encore, depuis le début.

Or, Ilnaëmb va tenir. A coups de sacrifices, d’héroïsme, d’exploits comme Sir Byng chargeant les trolls, la Paladin Lady Amorena tenant toute une nuit la brèche des remparts sud, Braun Coversidor mobilisant les citoyens pour repousser à coups de couteaux et même à mains nues un assaut sur les remparts méridionaux ou le jeune mage Bram Etherrion et le Chevalier Durndor de Terrel détruisant ensemble le camp des géants. Irwin VII meurt en défenseur sur les murs d’Inaemb, presque au même endroit que son demi-frère bâtard Athoen Paladin Glade quelques jours plus tôt.

Meredith III lui succède sur le trône et ne sera jamais sacré, on n’a pas le temps. Avec son oncle Corel de Chalkenmoon , il parvient à rassembler une armée de secours dans les Central Barriers, coalition hétéroclite d’alliés dont beaucoup de nains qui parviennent à contrecarrer le siège durant deux ans. Les commandants se succèdent : Julian d’EagleHunt, autre oncle du roi, tué par un dragon; Benezek Tashkenbar, vieux guerrier de la Ière légion, tué dans une sortie pour dégager Henrys. Et l’empereur Meredith lui-même, en combat contre Trollvak et ses trolls géants. Au moins le Naëmbolt ne manque ni de courage ni de panache.

Cyne Ier  » le Fier  » monte sur le trône en 4883, réduit à tenter de tenir jusqu’à ce que Wengoll arrive. Car Wengoll et la Starway ou ses armées ont libéré la Confédération, le Wejlar, l’Evriand et maintenant Durfalls cette même année. Et Wengoll arrive en effet sous les murs d’Ilnaëmb en 4897. Ou plutôt non pas Wengoll mais Negrod-Tür, Larraka, Beoliant, Orgund, Cuthbert Thorvoi, Sélim Frëa et Destrée Bleyn d’Isis: sept de la Starway car cette compagnie n’opérait jamais à plus de huit. Histoire dans l’histoire : on ne saurait raconter ici la Ballade de Wengoll ni la Légende de la Starway qui mirent fin à la Great Evil Coalition et suscitèrent un nombre colossal de vocations. Le métier d’aventurier y gagna ses lettres de noblesse universelle même si des ‘professionnels’ de l’aventure n’étaient ni à l’origine du projet ni la majorité de la Starway.
L’élan soulevé par la Starway amena aussi à Ilnaëmb la plus disparate des coalitions: élégants cavaliers, braves paysans, solides guerriers, fiers chevaliers, prêtres de tous ordres, scouts, voleurs, soldats de métier, bûcherons, mercenaires enthousiastes, assassins secrets, bandits s’achetant une conduite, centaures… le tout sous la houlette de la Negrod-Tür, précédé par les aventures, les raids, les commandos de ses membres et le talent de ces mages exceptionnels que furent Wengoll, Fang, Larraka ou Zelligar.
Or la G.E.C. ne s’attendait vraiment pas à ce que ses adversaires lui fassent le coup de Hornst. Usant des mêmes méthodes que les Héritiers, ils désorganisèrent non point le front mais les arrières de la G.E.C. Certes, la Starway n’avait pas le droit de violer la Convention de Bakor qui n’existait pas à l’époque du Soulslayer. Mais rien n’interdisait à un groupe d’aventuriers décidés de mettre en péril son existence contre une armée cent fois plus nombreuse et c’est pourquoi la Starway stricto-sensu ne menait jamais ses opérations qu’à six, sept ou huit. D’autre part, la G.E.C. ne disposait pas des ressources d’un Etat solidement constitué pour résister à de telles actions : le temps que ses grosses armées cherchent dans un coin les traces d’un commando, la Starway frappait déjà ailleurs. Et si les hordes se répartissaient afin de mieux surveiller le territoire, cette division les rendaient plus vulnérables aux forces armées. Car le charisme de ses chefs de la Starway ralliait à elle les populations sitôt leur libération et depuis Portown la masse s’était grossie des ralliés d’Ithyl, Holderin, Wyverns, Cryge, Evriand, Vizinov, Marn, Tangrune, Isablis, Toende, Durfalls, Corontown…
Avec une étonnante rapidité, la puissance de la G.E.C. se désagrégea sous les coups de la Starway à l’ouest, tandis que l’Alliance naine à l’est contraignait le Vizan à se désolidariser d’une cause de moins en moins prometteuse, délivrant du même coup l’Empire de cette menace supplémentaire. La Starway et l’Alliance naine sont en réalité, chacune leur côté, les libérateurs de l’Empire dont le titre de gloire – il est vrai magnifique – se résume à la résistance d’Ilnaëmb.

Mais quelle perte de prestige pour la couronne ! Quelle démonstration d’impuissance ! Une bande d’aventuriers de la Confédération et d’ailleurs pour libérateurs du territoire ! Parmi lesquels un elfe et un demi-elfe ! Lorsque Larraka entre dans la capitale de l’Empire, il n’est pas seulement le vainqueur des orcs mais encore le nettoyeur des décombres d’un certain Empire.

 

MINISTRES ET SOUVERAINS DE LA DISLOCATION

Après sa libération, l’Empire connaît une période de doute et de déclin. Il n’est plus question nulle part d’anti-elfisme ou d’impérialisme. Il faut, une fois encore, reconquérir le vaste territoire, le reprendre pièce par pièce des mains des partisans de la G.E.C. Le propre frère de l’Empereur, Kirmaël, meurt en 4899 pendant la reconquête de Newerton. Mais, tandis que la G.E.C. se disloque, l’Empire en fait autant.

Au début, l’Empire n’a même pas les moyens de participer aux expéditions finales de la Starway et doit laisser des individus se joindre à elle afin d’éradiquer définitivement ce fléau. Afin de ramener cette masse sous son gouvernement, Cyne décide de passer par l’Ost, c’est à dire par les nobles, et non par l’appareil administratif impérial appuyé sur les Légions. Cyne Ier  » le Fier  » se focalise en effet sur la reconquête quitte à gouverner à l’ancienne, de manière autoritaire et via les grands nobles. Son seul but, sa seule idée : des hommes d’armes, encore et toujours. Il y consacre tout le trésor de l’Etat, loue tout ce qu’on peut trouver de mercenaires, nomme et rémunère à tour de bras guerriers, chevaliers, barons. Ça porte ses fruits puisque la libération du territoire de l’Empire est à peu près acquise dès 4905. Mais il reste à tout réorganiser et les caisses sont épuisées par tant d’années de guerres alors que les revenus ne rentrent plus. L’Empire est un champ de bataille après la bataille, donc en ruines. Des villes comme Dilanovia, Bellridge ou Henrys sont détruites à 80%. Lever l’impôt ? Quel impôt et sur qui ? Or en dehors des frontières, Cyne apprend vite qu’il n’a aucun aucun crédit. Ses sollicitations auprès des banquiers Zevjans, Evrianders, Avrossians, Thûzzs aboutissent à chaque fois à la même réponse: réorganisez d’abord votre pays, garantissez votre solvabilité, on verra ensuite. D’autant que pour beaucoup, l’Empire est certes la principale victime de la G.E.C. mais aussi l’un de ses principaux responsables dans la mesure où, ayant les moyens de l’empêcher, il ne les a pas utilisés. L’Empire n’a pas su succéder à Dere même après la mort de Belgon. Ce dont des Thûzz, des Avrossians, des Confédérés, des Evrianders ont aidé l’Empire à s’en sortir quand c’est le contraire qui aurait dû être vrai. Désolés, on n’a plus confiance, dit en substance le monde à Cyne Ier.
Dans l’idée ce dernier, il ne reste donc que la manière forte. Au lieu de licencier l’Ost Impérial et de le limiter aux seuls débris de Légions, il l’emploie à collecter l’impôt en faisant au besoin plier les villes et les fiefs encore solvables, quitte à laisser des prévaricateurs locaux s’enrichir en passant. Bientôt petits nobles et cités se rebellent :  » laissez-nous au moins le temps de quelques bonnes récoltes, de refaire nos murs, de reconstruire nos villages  » plaident en vain leurs délégués au Parlement d’Ilnaëmb. Cyne n’a pas le temps : il lui faut au plus vite de quoi nourrir et payer son Ost, moins pour reconstruire les routes que pour reprendre pied sur la scène internationale. Dans un premier temps, cette tactique du passage en force semble réussir. Mais l’Empire est trop vaste pour être longtemps tenu par la seule puissance des armes. En 4906, une Ligue des Libertés est créée entre plusieurs villes et grands nobles du pays pour réclamer une refonte complète des institutions et une exemption fiscale temporaire. Après des escarmouches verbales et locales, au Parlement de 4908, la Ligue appuie ses revendication d’une menace de déposition de l’Empereur. Cyne Ier fait aussitôt emprisonner et exécuter ses députés. C’est la Guerre Civile.
Une guerre que l’Empereur ne pourra pas gagner. Il ne peut compter que sur l’Ilnaëmber, Durfalls March et le Strœlyn. L’Ost, mal payé, mal entretenu, désorganisé, se désagrège, régiments et compagnies de mercenaires prenant parti comme bon semble à leurs officiers. Après deux ans de campagnes, de sièges et de guerres entrecroisées, l’Empereur se retrouve finalement de nouveau acculé dans Ilnaëmb. On se croirait revenu à l’époque de la G.E.C. mais en face des murs de la capitale, ce sont des armées de seigneurs de l’Empire qui flairent le bon coup, les milices de cités rebelles, des mercenaires avides qui mènent le siège. Pour épargner à sa capitale un assaut, un pillage et peut-être un massacre, Cyne Ier se résoud à déclarer ouverte la ville basse et s’enferme dans la Cité Intérieure d’Ilnaëmb, l’Ailendil. La Ligue a gagné : elle entre dans Ilnaëmb, s’investit des charges de l’Etat et rétablit le Parlement. Est-ce la Révolution ? Non car Larraka, fort de son immense prestige, s’entremet et très vite la Ligue, coalition d’intérêts particuliers, sombre dans la discorde. Les rivalités intestines, les détestations ancestrales, sapent une union que seule cimentait l’opposition à l’Empereur. Les nobles se débrouillent pour anéantir les projets républicains de certaines villes. D’autres se menacent de guerres privées. Les mercenaires se paient sur la bête Ilnaëmb soulevant les citoyens contre leurs commanditaires. Après bien des palabres et des élections, la Ligue nomme Erwindal de Colstone au titre de Ministre d’Etat et convoque Cyne Ier pour lui dicter ses conditions. Cyne Ier refuse d’apposer son sceau sur la Nouvelle Charte d’Empire qui ferait de l’Etat Naëmbolt une monarchie constitutionnelle en apparence, en réalité une oligarchie aux mains de quelques grands nobles. Faut-il déposer l’Empereur ? se demandent alors les Ligués. Larraka menace de rejoindre dans ce cas le parti de l’Empereur. On se divise tant et si bien que le Parlement devient une foire d’empoigne dégénérant en une nouvelle guerre civile cette fois entre les vainqueurs d’hier. L’état d’anarchie de l’Empire devient indescriptible et beaucoup prévoient sa fin avec la mort de Cyne Ier qui survient cette même année, sans héritier mâle. Pourtant, une fois de plus, on se trompe.

Le long règne de Corelia  » la Sage  » inaugure une ère nouvelle de l’Empire : celle des conseillers ou plutôt des Ministres. Corelia la faible, dit-on: le talent de cette princesse qui ne se prédisposait en rien à devenir souveraine, surtout en des temps aussi troublés, a été de savoir laisser faire. Dès son avènement, Corelia choisit sur le conseil de Larraka un certain Anduneas de Brantes pour Ministre. Anduneas de Brantes paraît-il à la plupart un vieux filou issu de la roture, un intrigant ilnaëmber comptant une ascendance farxlane et dont le titre obscur a  été obtenu par mariage ? Qu’importe: il est voué à Corelia corps et âme et c’est cela qui d’abord compte. Le premier soin du nouveau ministre est désamorcer la guerre et de régler la question de la légitimité de la première Impératrice Naëmbolt. On se souvient que la mort de Coron VII ne laissant que des filles avait ouvert une crise dynastique ayant abouti à l’usurpation de la Couronne. Pour Anduneas de Brantes, l’Empire n’a plus les moyens de tels luxes. Il réunit donc le Parlement à Ilnaëmb en même temps qu’un grand conseil de tous les barons et déclare aux uns comme aux autres que l’Impératrice s’en remettra à leur avis, y compris sur les questions successorales:  » A supposer que les femmes ne puissent régner, Sa Majesté Corelia veut bien abdiquer, mais dites-nous en faveur de qui ?  » lance à qui veut l’entendre le rusé Ministre. Pendant une semaine, députés et nobles tentent de s’accorder sur un nom, ou au moins de se partager le pouvoir laissé vacant sans parvenir au moindre consensus. Au bout d’une quinzaine de jours, petit à petit, l’idée se fait jour qu’un arbitrage de la Couronne pourrait peut-être les aider à trancher leurs dissensions. Au bout de trois semaines, l’avis d’Anduneas de Brantes est sollicité de toutes parts. Au bout d’un mois, plus personne ne parle d’une quelconque abdication de l’Impératrice. Et au bout de huit semaines, la Couronne est quasiment en mesure de dicter ses volontés, ce dont Anduneas de Brantes se gardera bien. Il laisse au contraire la bride sur le cou des barons et encourage même les villes à faire ce qu’elles veulent. Un an, deux ans, trois ans plus tard, on guerroie toujours dans les campagnes et entre villes, les débris de la G.E.C. s’en donnent à coeur joie en effectuant raids et pillages comme ils veulent, il n’y a plus de monnaie nulle part ni de police ni de justice. Les marchands grondent, le peuple se révolte, il faut faire quelque chose.
Alors, le Parlement de 4916 se résoud à donner à de Brantes les pouvoirs qu’il exige afin de remettre en état les finances publiques afin d’entreprendre une reconstruction raisonnée du pays, principalement grâce à des impôts indirects. De Brantes refuse cependant toute charge de police: qu’on se débrouille sur place, l’Etat n’est pas assez fort ni assez soutenu. Cette politique libérale et avisée porte rapidement ses fruits: les barons s’amusent à jouer aux guerres privées, les villes se fortifient contre les barons, et la couronne joue des uns avec ou contre les autres au gré de ses intérêts. Mais ainsi, petit à petit, l’argent rentre à nouveau, une administration centrale renaît, on peut financer des travaux et même relever un peu de l’armée. En 4920, quatre légions sont de nouveau à pied d’oeuvre à Ilnaëmb, Durfalls, Isablis et Dilanovia. Le Ministre peut alors se consacrer à reconstituer le Trésor d’Etat, puis entreprendre la reconstruction des routes et le relèvement des grands corps de l’administration impériale. A la fin de la vie d’Anduneas de Brantes, il est craint des nobles, redouté des villes, inconnu du peuple et adoré par les serviteurs de l’Etat et par l’Impératrice. Son habileté suprême aura consisté à ne jamais se trouver en position de conflit ouvert avec quiconque. Celui que ses nombreux détracteurs appelaient le  » Serpent du Palais  » a bien mérité de l’Etat Naëmbolt.

Depuis lors et jusqu’au règne de Nirag Ier, la réalité du pouvoir échappera à l’Empereur pour se trouver exercée par ce Ministre qu’on appellera parfois Ministre ou Vicaire d’Etat. Favori du monarque ou choix du Parlement, c’est lui qui se chargera de proposer à l’Empereur les plus importantes lois et de le convaincre de les accepter. Parler du règne tel ou tel Empereur successeur de Corelia signifie en réalité évoquer l’influence de son Ministre: Brendûn de Goldhelm, Seymour de Berentz, pour pour John-Alexander II; Chaunac Dal Volgoronski pour Cyne II; Aliantha Kowalev pour Irwin VIII; Irwin de Chalkenmoon puis Carol de Brize puis Charles Suard-Benevent pour Irwin IX; Mortimer de Montaygue pour Valerus IV; Waldeck Rodemar-Terrel puis Erwan de Chalkenmoon pour Valerus V… Ces grands conseillers ou politiciens intéressés érigent la Cour et le Parlement d’Ilnaëmb en unique centre politique du pays, l’éloignant des réalités locales. Les conflits locaux et guerres nobiliaires prennent alors des proportions inouïes. D’aucuns vont en appeler aux plus maléfiques des alliés. On verra des gobelins, des trolls, des géants et même des dragons associés à des blasons parfois prestigieux. Dans l’autre sens, certaines grandes maisons ou leurs branches font assaut d’exploits, notamment les Goldhelm, les Dwarvenstone, les Satansdoom d’Agle, les Telinorë-Arwen ou les Tolebrand de Terrel.
Grandes provinces et régions de l’Empire fonctionnent de facto de façon autonome, hormis un plus petit commun dénominateur de justice impériale et de l’impôt d’Etat. Cette période ultra-féodale, où l’appartenance à une famille et un terroir prime toute autre, affaiblit considérablement l’Etat qui s’avère incapable d’oeuvrer sur le plan international où le Vizan va régner en maître. S’ouvre ainsi l’ère Vizaner : le Califat va annexer Zevjapuhr, s’allier à Viris pour prédominer en Tangut, vassaliser l’Okhpuhr, le Ponant et jusqu’au Wejlar. C’est aussi le moment où les principaux acteurs du monde deviennent la Confédération, le Thûzzland, le Ritterland, Avros, pays économiquement riches dont les nobles se montrent bien moins turbulents que les féodaux d’Empire.

Dans cette période troublée, la légitimité de Corelia, pourtant très contestée à l’origine, incarne le seul point de ralliement et de consensus, mais la Couronne se refuse à intervenir dans les guerres privées et se borne à veiller aux frontières. Cela entraîne une conséquence inattendue car, puisque la transmission des titres par les femmes est ainsi admise, bon nombre de maisons des nobles, qu’il s’agisse des nouvelles instituées par Cyne Ier ou des celles ayant survécu à la G.E.C., voient dans le mariage de leur fille ou de leur fils avec un rejeton Naëmbolt le moyen d’obtenir influence et crédit à la Cour et peut-être aussi une place dans l’ordre successoral. Cette pratique ne cessera plus depuis lors. Ainsi, à compter du règne de Corelia , cadets et filles Naëmbolt se verront systématiquement offrir un considérable éventail d’épousailles et titres de quelque grande maison d’Empire, Dwarvenstone, Oakfen, Arwen ou Terrel par exemple.
Mais l’effet pervers de ce nouveau système est de compliquer singulièrement le jeu dynastique et d’attiser les rivalités entre maisons, voire entre frères. Ainsi, des quatre fils de Corelia, trois se succéderont sur le trône. Et quels fils ! Faut-il croire, comme on le fit à l’époque, que quelque malédiction divine ou démoniaque s’acharnait alors sur la maison Naëmbolt ? Car, après la mort de Corelia, ses héritiers ont piètre allure. L’aîné, John-Alexander II le Lépreux restera sans descendance. Il se fait finalement déposer l’année de sa mort par Cyne II le Boiteux qui en a assez de patienter mais qui sera lui-même assassiné par des sbires à la solde de son cadet, Irwin VIII le Manchot (qui souffre en réalité d’une atrophie du bras droit ). Le plus jeune frère, Valerus, a fui dans le château de sa femme, chez les Oakfens, avant d’être retrouvé mystérieusement noyé et empoisonné. Ces trois règnes n’ont laissé d’autre traces que celles de leurs Ministres d’Etat. Pendant que la Cour se déchire et que les nobles gouvernent, la Couronne survit, préservée a minima, comme en attente de jours meilleurs. Tout l’effort des Ministres d’Etat au cours de ces règnes, leur cause commune, sera de dissuader toute puissance étrangère de s’en prendre à un pays si mal en point. Ce n’est pas leur moindre mérite que d’y avoir en effet réussi.

Irwin IX, fils du Manchot et dit  » le Bien-Aimant  » , tente de s’en tirer en menant quelques guerres frontalières. Avec lui, les derniers restes importants de la G.E.C. sont définitivement évacués du territoire impérial. On pense alors que son règne commence assez bien mais il n’en sera rien. Rapidement, le jeune et prometteur empereur passe sous l’influence de maîtresses avides de pouvoir. On découvre en cet homme un débauché qui n’aime rien tant que les parties fines et les orgies depuis sa chambre au Palais jusque dans les bas-fonds de sa capitale. Néanmoins, son règne aura quelques splendeurs car Irwin IX est aussi un protecteur des arts, du théâtre, de la peinture et de la danse. Il faut venir et accueille des artistes qui ne sont pas seulement licencieux et grâce auxquels Ilnaëmb s’embellira considérablement. Mais ses goûts de luxe et de luxure reviennent cher à la cassette impériale. Il finit en autocrate velléitaire qui vend au plus offrant les décisions de la Couronne. Charles Suard-Benevent, son dernier Ministre d’Etat, évitera de justesse la vente du Sablern à Zevjapuhr.

Valerus IV  » le Rouge  » est l’aîné de six frères et de huit soeurs, sans compter nombre de bâtards et bâtardes. Le règne de Valerus IV est l’un des plus difficiles de l’histoire de l’Empire car c’est entre frères Naëmbolts qu’on se déchire. Maudwaith d’Oglevern, le plus âgé des cadets sera aussi celui qui mènera pas moins de quatre guerres contre son aîné. Nemelrod d’Arvein se proclamera Empereur d’Orient et établira sa capitale à Orfajaz. Chaïm de Dwarvenstone dressera l’Arkandahr et l’Eriendel contre la Couronne. Meredith de Johstarre, le cadet, surnommé le Fléau d’Atanak, n’hésitera pas à passer alliance avec la Citadel of Blood pour ravager le Heart. Farne de Terrel feindra de supporter la Couronne en tentant d’intriguer avec le Thûzzland, le Vizan et le Saint-Etat Théocratique pour une invasion qui l’amènerait sur le trône. Ce sont les fils cadets de Valerus IV, Kermegg de Naù et Cyne de Colstone, qui seront ses seuls et meilleurs appuis. Kermegg de Naù, avec l’aide du Paladin Glade et des Chevaliers de Prias, anéantira le Fléau d’Atanak. Cyne de Colstone mettra le siège devant Orfajaz et exécutera de sa main Nemelrod l’Usurpateur. Farne de Terrel se prendra lui-même les pieds dans les rêts de ses intrigues et finira solitaire, renié et abandonné par sa propre maison, puis emprisonné et finalement exécuté à Rwandel. Quant à Maudwaith d’Oglevern, il sera tué en combat singulier par l’Empereur lui-même. En apparence, on assiste donc une éclatante victoire de la Couronne. Mais en réalité, cette  » victoire  » prend les trois-quarts du règne: quinze ans d’expéditions, de conspirations, de guerres. Et, pour finir, le coeur brisé de Valerus IV lorsqu’il découvre quelques échanges de lettres fort courtoises entre son propre fils aîné, le futur Valerus V, et Nemelrod d’Orient et lorsqu’il apprend que l’héritier impérial a eu de coupables accointances avec la conjuration de Farne de Terrel. Pourtant, au grand désappointement de Cyne de Colstone, Valerus IV ne peut se résoudre à déshériter son aîné et préfère mourir de chagrin.

Le règne de Valerus V  » Mains Pleines  » sera donc celui des prébendes. C’est l’apogée de la grande époque des marchands (l’I.T.G. fait à cette période adopter le statut dérogatoire des marchands internationaux) et des guildes citadines. La tête de l’Empire vaque d’un lobby à l’autre, d’un financier à l’autre. Prévaut la politique du plus offrant d’où l’effondrement de la fonction publique dont les charges deviennent vénales dans tous les sens du terme. Le véritable pouvoir passe plus que jamais par le Parlement qui impose ses choix et où priment les députés des cités les plus prospères (Ilnaëmb, Orfajaz, Isablis, Bellridge, Blumwald…) au détriment des moins riches (Dilanovia, Newerton, Naù…) La plupart des grandes maisons nobles s’adaptent pour ne pas subir l’influence de cités qui ont assez de fonds pour constituer des milices et des unités de mercenaires capables de tenir tête aux armées nobles, voire aux Légions. Cependant, ce règne n’est pas sans acquis: la prospérité retrouvée des villes, stimulée par une bonne conjoncture économique générale dans nombre de pays (Confédération, Farxel Ritterland, Zevjapuhr, Avros, Vizan, Thûzzland), permet l’enrichissement de la bourgeoisie de l’Empire et détourne beaucoup de petits nobles du métiers des armes vers ceux du commerce, de la finance et de l’industrie. Sous le règne de Valerus V et plus encore sous celui de son successeur John-Alexander III, lentement mais sûrement, l’Empire refait sa richesse et redevient une puissance économique. Cependant, la Couronne est un otage aux mains de marchands, et l’Empereur un infirme politique qui borne son ambition à une sorte de vaste marché continental.

Néanmoins, ce développement économique finit par déranger du monde et notamment les principaux rivaux de l’Empire : Vizan et Avros. Mais John-Alexander III  » le Fol  » a de bons conseillers, au premier rang desquels Othon Walbarez de Nuñaticca, riche éleveur devenu député d’Anequere puis Ministre, qui désamorce la crise avec le Vizan et réussit même à la transformer en accord commercial et naval avec le Califat, ce dont l’Amiral Baldur d’Oakfens est le premier à le féliciter. Avros n’est pas contente et la République a en effet de bonnes raisons de s’inquiéter : en contractant avec le Vizan, l’Empire réapparaît de façon éclatante sur la scène internationale pour la première fois depuis deux siècles. Cette alliance Vizan-Empire unit les deux pays plus étendus de Derenworld dont la réunion fait un géant géographique et diplomatique. Si l’on excepte les pays barbares ou la Great Anarchy, il ne reste en tout et pour tout que quatre puissances qui ne soient pas directement ou indirectement dans l’orbite de la nouvelle alliance: Avros bien sûr, Dere, le Lowenland et le Thûzzland. Avros la Maritime se retrouve à la seule et unique puissance humaine en face du géant territorial. Même les deux Farxel, même la Confédération ont des traités les liant à l’Empire ou le Vizan ou leurs vassaux.
Les craintes de la République s’avèrent vite fondées : depuis des années, les Thûzz refusaient la juridiction de l’I.T.G. sur le trafic commercial international dans leur pays, qu’il soit ou non transitaire. Ces droits de douane élevés gênaient considérablement le Vizan, le Farxel et l’Empire qui, pour se commercer les uns avec les autres, doivent quasi obligatoirement passer par les vallées du Thûzzland. Depuis la scission du Farxel, l’unique autre voie, maritime, oblige à contourner la moitié du continent, sur terre en passant par Zevjapuhr ou sur mer par Avros. Pressés par l’I.T.G., l’Empire et le Vizan lancent donc un ultimatum au Thûzzland afin de tester sur les nains leur nouvelle influence de superpuissances conjuguées. Espérances déçues : Merin XV de Thûzzland les envoie tout bonnement promener. Dès cette réponse connue, le Parlement d’Empire, avec une consternante légèreté, vote la guerre, malgré l’influence d’Othon Walbarez. Cette décision surprend tout le monde et d’abord John-Alexander III. L’Empereur n’a pas tellement envie d’entrer en conflit avec des nains qui ne lui ont rien fait. Othon Walbarez démissionne. L’Empereur songe à abdiquer. Mais on explique à Sa majesté que l’occasion est là, que c’est le moment et le moyen de prendre le Vizan de vitesse, de montrer au monde la force de l’Empire reconstruit. Walbarez est vieux, timoré; les temps sont au renouveau. Dans le fond, John-Alexander est un faible : il finit par céder et signe la Déclaration de Guerre et la nomination au poste de Ministre d’Etat du chef des jeunes marchands, Tucker Pianzo. Il semble que personne n’ait alors réalisé combien  l’Empire est depuis Valerus V devenu la proie d’intérêts purement mercantiles.
Le Vizan, traditionnel allié et client des Thûzz, ne suit pas et préfère attendre la suite des événements : les Ritter et Avros, eux aussi alliés au Thûzzland, viseront bien plutôt le Califat que l’Empire en cas de conflit ; il sera bien assez temps, une fois les nains coincés dans leurs forteresses, de régler avec l’Empire les modalités d’un accord d’occupation de leurs vallées… Les Vizaners n’imaginent pas à quel point ils ont eu raison de montrer aussi prudents. D’ailleurs personne dans le monde entier n’imagine ce qui va se passer.
Rassemblée à Haldwarrow, l’armée impériale chargée de l’offensive, dotée de trois légions (VI, VII, et VIIIe) toutes pimpantes, prend son temps et prépare ses plans d’invasion. Une quatrième légion, la XIe, assure les arrières de la force d’attaque. Le 26 Gemini 5045, celle-ci est attaquée par trois corps de bataille de nains venues semble-t-il de nulle part et ayant pénétré en Empire sur plus de vingt lieues de profondeur. Surprise, la XIe Légion est dispersée. Les trois autres se retrouvent ipso facto encerclées dans Haldwarrow mal préparée pour tenir un siège et un assault; elles doivent capituler peu après. En deux mois, quatre des douze légions impériales sont mises hors de combat. Il ne reste que quelques forces de réserve articulées autour de la Xe Légion bientôt contraintes de retraiter dans les Salthills ou de s’enfermer dans Castle Broke. Au lieu de mener le siège de cette citadelle, les thûzz choisissent de foncer vers Orfajaz où ils mettent le sège tandis que des forces navales avrossianes en organisent le blocus. Sous les murs d’Orfajaz va se dérouler la bataille des quatre Jours (5-8 Balance 5045), une des pires tueries de toute cette guerre à l’issue de laquelle la balance finit par pencher en faveur des Thûzz. L’Empire a perdu le quart oriental de son territoire et implose.

La désagrégation de 5045 restera peut-être dans les annales de l’Empire comme son moment le plus sombre. Sur leur lancée, les Thûzz raflent, pillent et détruisent, outre Orfajaz, Soulskinne, Gelkard, Newerton et Blumwald. Ce n’est pas la première invasion que subit l’Etat Naëmbolt mais cette fois elle s’accompagne d’un sauve-qui-peut général. On s’enfuit à l’approche des Thûzz; on n’essaie pas de leur résister ni même de parlementer: on se soumet ou on s’échappe. D’où un long flux d’exilés d’est vers l’ouest qui se répand et accroît la panique générale. Surtout, celle-ci gagne la tête de l’Empire puisque le 30 Scorpio, John-Alexander III devenu fou se suicide après avoir trucidé toute sa famille. Le désarroi est tel qu’on ne songe même pas à nommer un successeur, en l’occurence son neveu Kermegg de Naù, descendant de Valerus IV et plus proche héritier, qui est alors aux armées. Tucker Pianzo, complètement dépassé par les événements, se retrouve seul au pouvoir. Il destitue Larraka qui tentait d’intervenir pour faire nommer un Conseil de Régence en l’accusant de vouloir devenir un dictateur, ce qui a pour résultat de soulever l’hilarité de bon nombre de grands nobles.

Cyne de Colstone, autre neveu du défunt empereur et lui aussi descendant de Valerus IV, décide alors de réagir. A la tête de la Ière Légion et des forces de son fief, il se fait ouvrir la Cité d’Ilnaëmb et prend le titre de Ministre d’Etat par intérim ; il fait emprisonner puis exécuter la moitié du Parlement devant les édiles épouvantés. Tucker Pianzo, en fuite, est arrêté et pendu. Ayant ainsi ‘assis’ son pouvoir, il transmet à Merin XV une demande d’armistice au moment même où les Thûzz installent leur camp devant Ilnaëmb. On pouvait difficilement choisir pire occasion et les contre-propositions Thûzz reflètent le rapport de forces : annexion des Salthills, du Sunmarch et du Valdorse (soit une amputation d’un dixième du territoire), cession du Sablern à Zevjapuhr, du Gaïko à Avros, indépendance de l’Eriendel, du Stroelyn et du Southern Kelnore, rattachement de Durfalls à la vallée d’Arlve… bref ni plus ni moins qu’un quasi-dépecage de l’Empire, sans compter de colossales indemnités financières. Pourtant, Cyne de Colstone accepte le principe d’une négociation et part à cet effet rencontrer Merin XV.

C’est ce départ qu’attendait Kermegg de Naù, principal rival de Cyne. Kermegg revient à bride abattue du fin fond du Southern Kelnore et entre dans Ilnaëmb le 3 Sagittarius par une porte dérobée. Soutenu par les nobles, l’armée et quelques survivants du Parlement, il se proclame Empereur et déclare qu’il faut continuer la guerre face aux conditions inacceptables et même grotesques proposées par Merin. Toutefois, la capitale ne le suit pas et s’aligne du côté de Cyrus de Colstone, comme la plupart du peuple et des guildes: on a peur, on veut la paix, à n’importe quel prix. Et la peur explose le 4 Aquarius 5045 où la foule ilnaember incendie le Parlement en y grillant d’infortunés parlementaires puis envahit la Cité Intérieure et défenestre l’Empereur Kermegg. Un quart d’Ilnaëmb est détruite par l’incendie. Dehors, goguenards ou apitoyés, les Thûzz attendent les dernières nouvelles.

Car, en attendant de devenir à son tour Empereur, le futur Cyne III parlemente âprement à Orfajaz avec les émissaires de Merin de Thûzzland : il sait que sa chance de se voir couronné se joue sur le résultat de ces négociations. Il connaît les thûzz, il a compris que Merin a entamé la négociation en position de force et que les trois quarts de ses demandes sont en réalité des concessions qu’il est prêt à abandonner en échange de ce qu’il veut réellement. Reste à savoir la teneur de ce qu’il veut réellement. Entre-temps, le Vizan offre une médiation aussitôt rejetée par les parties. En revanche, on accepterait peut-être les bons offices du Ritterland mais il faut attendre que les diplomates voyagent, se rencontrent… Bref on atermoie, palabre, contre-propose et les Thûzz s’impatientent : l’hiver a commencé, il a l’air rigoureux et les guerriers nains auréolés de gloire voudraient bien revoir leurs familles, clans, forges. Cyrus l’a compris, il croit que le temps travaille pour lui, s’imagine de plus en  plus futur Cyrus III Naëmbolt Imperator.

Cyne de Colstone, veut que la mort de John-Alexander signe aussi la fin d’une époque. Il souhaite réconcilier l’Etat et le pays avec la Couronne en tant que descendant en ligne directe de Mellung Naëmbolt et que c’est cela qu’il faut rappeler, rétablir. Mais aux habituels détenteurs du pouvoir : le monarque, les nobles, les guildes et cités, se sont joints la Cour, les Ministres, le Parlement, la cité d’Ilnaëmb, le peuple. Lorsque la foule incendie le Parlement le 4 Aquarius 5045, c’est plus qu’un symbole : on vise le Parlement parce que c’est devenu une instance de décision au même titre que le Palais de l’Ailendil. Ce peuple affirme lui aussi sa propre prétention au pouvoir, sans passer par une faction de nobles ou à la volonté du monarque. Envisager le sort de l’Empire en 5045 implique d’intégrer ces acteurs politiques apparus pendant la dislocation.


CHRONOLOGIE DES EMPEREURS NAEMBOLT

(changement de ligne = filiation, changement de colonne = cadet ou dynastie)

IRWIN IV
 
 
 
 
 
 
 
(4786-4812)
             
 
             
IRWIN V
             
(4812-4837)
             
 
             
IRWIN VI
             
(4837-4859)
             
               
NAMRODD II              
(4859-4874)
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
IRWIN VII
 
 
 
 
 
 
 
(4874-4881)
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
MEREDITH III
 
CYNE I
 
 
 
 
 
(4881-4883)
 
(4883-4910)
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
CORELIA I
 
 
 
 
 
 
 
(4910-4940)
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
JOHN-ALEXANDER II
 
CYNE II
IRWIN VIII
 
 
 
 
(4940-4951)
 
(4951-4955)
(4955-4967)
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
IRWIN IX
 
 
 
 
 
 
 
(4967-4981)
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
VALERUS IV
 
 
 
 
 
 
 
(4981-4998)
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
VALERUS V
 
 
 
 
 
 
 
(4998-5034)
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
JOHN -ALEXANDER III
 
KERMEGG I
 
 
 
 
 
(5034-5045)
 
(5045-5045)

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