Auparavant on eut le meilleur de Cordell avec cette histoire du Gulthias Tree qui m’a vraiment plu : l’idée que le vampire infuse dans l’épieu qui le détruit pour qu’il devienne arbre maudit et maléfique, fallait la trouver. Ce sombre miracle a captivé un druide jusqu’à le mener à une apostasie l’ayant conduit à être rejeté par les siens et à ainsi mener ses propres expérimentations et démarches en osmose avec le Gulthias. Vous mîtes un terme à la carrière naissante de ce prophète.
Bien auparavant un ancien castel, sur la base d'une ferme fortifiée appartenant à une famille Tchoderlok, fut construit aux abords de la route d'Hillbreak à la fois pour la surveiller et pour servir d'entrepôt, de relais de poste, et de centre défensif. Il fut pris et devint le centre opérationnel des forces d'Ashardelon au cours des guerres des Seconds Héritiers. Ashardelon bénéficia de nombreuses aides y compris magiques pour agrandir et renforcer le castel. Le grand ver rouge eut ensuite l'idée de commencer à rouler pour lui-même et de s'écarter ainsi des Héritiers et notamment de son ex-proche Molior Dragonskull ; en tant que joueurs vous savez que c'est ce qui causa sa perte en suscitant l'intervention de Dydd afin de défendre le Lyrwood, ce qui contraint in fine le dragon à quitter le plan Matériel.
Après ce départ, un culte de type orichalien s'organisa et maintint dans le castel un peu pompeusement renommé citadelle en imitation plutôt qu'hommage aux véritables Citadelles du Nord. Pareille impiété dans le voisinage de Hillbreak entraîna une expédition lors de la reconquête et du nettoyage de l'Arkandahr menée par des paladins, rangers, elfes mages et prêtre en 4661. Au cours de celle-ci Brother Ed, un serviteur d’Athéna, décida de simplifier le travail et un Earthquake fit disparaître la citadelle maudite sous terre. Tous les cultistes furent tués, la route d'Hillbreak était dégagée, les good satisfaits. Cependant les propriétés magiques de la citadelle avaient permis la conservation d'une bonne part de son intégrité structurelle mais cela n'inquiéta pas plus que cela puisqu'une divination assura que tous ses habitants, y compris les zélotes d'Ashardelon, avaient péri.
Deux siècles se passent au cours desquelles les ruines sont pratiquement oubliées. Mais en 4872, au cours de la G.E.C., l’endroit alors rebaptisé Sunless Citadel est redécouvert par des troupes auxiliaires, notamment des kobolds pro-draconiques qui y virent un sanctuaire à la gloire de la puissance de Kurtulmak par son prophète Ashardelon. Ils s’y installèrent mais furent quelques années plus tard soumis par le vampire Gulthias qui régna pendant toute la période de la G.E.C sur l’endroit. Il fut vaincu en 4917 par un groupe d’aventuriers commandité par le futur monarque Jubal V et mené notamment par le paladin Deker Wilkes, le demi-orc Clayton Ryûr et le hobbit Fedjen the Swift qui lui planta un épieu dans le cœur. Mais si puissant était Gulthias que sa mort-vie disparaissante imprégna le bois de l’épieu pour le transformer à son tour en mort-vivant végétal.
Le souvenir de l’aura maléfique de Gulthias tint toutes créatures à l’écart des ruines pendant des décennies à l’exception d’un très petit groupe de kobolds, serviteurs délivrés du vampire, qui maintenait secrètement une sorte de vain culte d’Ashardelon. La citadelle souterraine fut finalement réinvestie au début du millénaire par des gobelins qui y trouvèrent refuge, massacrèrent la plupart des kobolds, et s’en servirent d’arrière base pour leurs rapines. Mais ils n’en avaient pas terminé avec les kobolds car ceux-ci furent ameutés par Znikadrat, ancêtre de Yusdrayl qui avait réussi à échapper aux gobelins ; par la suite, cette famille n’eut de cesse de reconstituer des forces koboldiques afin revenir occuper ce lieu pour eux sacré.
Les gobelins avaient entre-temps trouvé le Gulthias Tree et son fruit magique annuel mais ils finirent par être chassés des lieux par la multiplicité des offensives koboldiques et c’est ainsi que le druide Belak en entendit parler. Belak visita alors discrètement la citadelle, découvrit l’arbre qu’il trouva miraculeux et en fut captivé. Mais il ne put persuader ses confrères d’adhérer à sa foi. Il revint donc sur place avec une force de gobelins qui récupéra la majeure partie de la Citadelle. Puis il mit en place ses expériences.
Ce module, bien qu'originellement conçu pour la découverte et l’initiation à la 3e ed,, m’a tout de suite plu d'un bout à l'autre de sa lecture jusqu’à ce set-up terminal juste assez difficile pour affaiblir (la forêt d’épines) ou handicaper (les entangles) le groupe d’aventuriers afin de rééquilibrer un encounter final qui n’a rien d’insurmontable.
Sont encore typiques de Cordell ces NPC forts qui se prêtent bien à la caractérisation (Meepo, Yusdrayl, Belag, l’aventurier bugbear…), l’entrelacement de solides trame de fond (Ashardelon – kobolds, Gulthias – gobelins), la stratégie défensive et la logique des divers composants du donj’. Et encore, vous n’avez pas tout vu...
Enfin, il n’est pas si fréquent qu’un auteur de D&D commence l’exposé d’une aventure par un exergue de Rimbaud, que voici en français :
Tout roule avec des mystères révoltants
De campagnes d’anciens temps ;
De donjons visités, de parcs importants :
C’est en ces bords qu’on entend
Les passions mortes des chevaliers errants :
Mais que salubre est le vent !
(La Rivière de Cassis, 1872)
Le groupe a globalement bien géré les obstacles qui lui étaient opposés, ses faiblesses internes, la conduite tactique et relationnelle des divers encounters malgré la souffrance et l’inquiétude caractéristiques des bas niveaux et la difficulté d’y revenir après un an à l’extrême inverse de l’échelle de puissance. Ce sont des niveaux où l’on « tombe » souvent, on le sait : 3 au tapis dans cette dernière session, sans descendre sous -5 fort heureusement parce que Sharwyn ne met pas le coup de grâce à certain barbare chu auprès d’elle ni n’ordonne aux twigs de le faire pour elle. Le bien joué et le courage de Korg n’auraient pas mérité ça.
Même si la 3e ed. conçoit les objets magiques comme des appoints secondaires à la mécanique de progression des personnages, de belles trouvailles se font rarement avant le 5e niveau et vous me semblez plutôt correctement nantis pour un groupe de 2-3e. N’oubliez pas que votre serviteur tend à vous avoir donné de mauvaises habitudes avec le Mezeler ou Harwind, à l’instar de Peterson dans Rappan Athuk. Toutes les aventures ne sont/seront pas forcément aussi abondantes en récompenses extraordinaires que celles proposées ces dernières années.
La campagne va se poursuivre ; elle s’articule sur 3 modules de durée moyenne ou courte, comme celui que vous venez d’achever, qui seront suivis d’une affaire plus longue commençant vers le 5e niveau. Nous avons le temps de découvrir tout ça.
D’ici là les XP pour la clôture de cette aventure s’élèvent (tout compris et %ges inclus) à 2307 par personnage.
Et encore merci à Olivier pour sa magnifique hospitalité !

Nous jouons la suite le 15 janvier prochain.

Et bien sûr, bonne année 2021 à tous !


