Il sera peut-être pas inutile à quelques nouveaux venus de préciser l’origine géographique de leurs personnages. C’est le but de cet article. On pourra aussi consulter la carte suivante (cliquer pour une version agrandie) qui indique l’emplacement sur Derenworld des contrées de Farath et de Sablern, et des villes de Newerton et Manzaïr.
Pays de Farath(Tangut) |
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Ce nom désigne un ensemble de fiefs situés en partie occidentale du Tangut, sans capitale ni grande ville et sans système étatique unificateur d’une société très féodale. Le Farath est extrêmement désorganisé et le terme renvoie à une entité géographique ou sociale plutôt que politique. Il est souvent quoique inexactement considéré comme une sorte de marche orientale du Farxel.
L’une des rares contrées de Parler Farxelois, le Farath naît pourtant par le refus de ses nobles de s’intégrer au Farxel lors de la constitution de ce dernier, préférant incarner une sorte de reliquat d’une civilisation plus ou moins fantasmée des Färz, peuplade humaine originelle de la région.
La cohésion du pays s’opère par un appel à l’aide des voisins en cas de danger et par une solidarité de fief à fief pour les besoins courants, mais le territoire souffre d’une lourde absence d’infrastructures communes, typique du Tangut. Le Farath dispute aux Inghels (ses voisins méridionaux et grands rivaux) et au Viridistan (capitale : Viris, où siège de l’auto-proclamé empereur Hautulin, aussi appelé the Green Emperor) la revendication du trône impérial de Tangut, se considérant comme eux la matrice de son ancien empire.
Le Farathien est très individualiste, très familial, mais a également la réputation d’un bon vivant quoiqu’un peu chatouilleux sur les questions d’honneur personnel. Le pays est autarcique mais sans réputation économique particulière à part un excellent cheptel de bovins et des vignobles de très grande qualité quoique peu nombreux. Les cultes de Thor, Heimdall, Frigga, Horus, Freyya, Nephtys et Dyionisos, à un moindre degré celui de Silvanus, y sont bien implantés mais le farathien est relativement peu religieux.
Le Farath est un ferme allié des Ritters de Farxel depuis des lustres et également ami des nains dzîrmeshs de Thunderhold et de Valonne en Tangut, qui sont ses principaux clients en fromages, viandes, vins et céréales. Une fraction notable de la richesse du Farath provient de deux mines de platine dont l’exploitation est confiée à deux compagnies marchandes basées à Blade et à Osport (Farxel) et dont le capital est disséminé chez des nobliaux et bourgeois de toute la contrée. Le pays importe principalement d’autres métaux.
La cuisine du Farath est paticulièrement réputée. Les plats suivants se trouvent à peu près partout dans le pays : Codième : morue salée au lentilles ; Buraude : pièces de canard ou oie préalablement grillés et servis avec soupe de légumes aux foies et abats de ces volailles ; Clindongan : porc mariné aux épices cuit à l’étouffée avec une sauce caramélisée au miel ; Loche : ragoût de boeuf au vin et carottes ou champignons.
Le Farath connaît une diversité raciale étonnante pour un pays aussi peu étendu car la vision traditionaliste du monde par les Farathiens en fait des fidèles de l’Ohar’s Scroll. Pratiquement toutes les races du Scroll y sont présentes, avec une légère dominance des nains dzîrmeshs. A l’inverse, le Farath est logiquement très hostile aux autres races humanoïdes ou monstrueuses. Il y a de quoi faire car le pays est sous la menace d’importantes populations de géants, trolls, gobelins et ogres situées à l’est.
Hors Valonne et Thunderhold, le Farath est peu apprécié dans le reste du Tangut, où il est souvent considéré comme un faux nez du Farxel. Mais il suscite aussi une certaine attirance, par sa forte identité et par sa combinaison bien particulière de liberté et de fidélité qui est aux fondements de son lien social et qui, pour beaucoup de tangutiens, paraît assez emblématique de ce que serait un Tangut idéal.
Le Farath entretient une relation compliquée avec Avros et plus généralement avec la mer, élément dont la plupart se méfient. Cela entraîne qu’un jeune farathien intéressé par la marine doit la plupart du temps émigrer s’il veut y consacrer sa vie ; or nombre de ces émigrés trouvent un excellent accueil en Avros où ils réussissent souvent au point de faire parfois de grands capitaines, ce qui du coup avive l’antipathie des farathiens envers les avrossians.
Principat de Sablern(Empire Naëmbolt) |
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Ce qui fut une principauté (d’où le titre officiel de la province, qui cependant est parfois encore appelée principauté), réunie depuis des siècles à l’Empire Naëmbolt, demeure l’une de ses plus belles provinces.
Climat merveilleux, terres exceptionnellement fertiles, abondantes productions agricoles et vinicoles dont sont remarquables : lin, coton, soie, vin, tabac, blés durs, maïs, charcuteries. Architecture typique dont la capitale, Isablis la Blanche, est emblématique : maisons blanches avec toitures plates ou en tuile, organisées autour d’un patio. Fleurs aux fenêtres protégées par des barreaux. Lieu béni des dieux, depuis la Visitation d’Isis. Pays de cultes raïques : Isis, Râ, Nephtys, Bast, Osiris, Horus, fortement enracinés.
Le Sablern est composé de terres qui furent deranes, le positionnant géographiquement au coeur de l’alliance entre Wejlans et Derans : les elfes Sindars et les demi-elfes y sont encore particulièrement nombreux et se sentent un peu « comme chez eux dans un pays humain». Le peuple du Sablern a en effet mal accepté la période anti-elfique de l’Empire et marqué de tout temps sa défiance sur ce point envers la couronne Naëmbolt. Les Sablernis redoutent les Variks, se méfient un peu des Vizaners, s’entendent merveilleusement avec les Zevjans, sont favorables aux elfes, et se sentent à la fois différents et complémentaires du reste de l’Empire.
Peut-être parce qu’il s’agissait de cimenter un peuple aux origines ethniques très diverses, mêlant variks méridionaux, maurims et alnoes, les sablernis ont développé une très forte identité culturelle et ils se considèrent comme profondément différents de tous leurs voisins, y compris d’Empire. Réputation d’hommes tenaces quoique décontractés, religieux mais sans rigorisme, assez intellectuels, et surtout de gens pour qui l’esthétique compte. Ils aiment le soleil, les fleurs, la guitare, la danse, les vins, les charcuteries, les cigares. Costumes typiques : les hommes vêtus de blanc sauf les veufs vêtus de noir, les femmes mariées de rouge, les filles d’orangé ou de jaune, les veuves de violet.
Le nom du territoire vient du sable noir de certaines rives de l’Ennros près de son confluent avec l’Undine ; des savants vizaners découvrirent que ce sable, raffiné, pouvait produire des métaux rares : titane, manganèse, utilisé pour des alliages spéciaux. Bien que de faible rendement, cette exploitation perdure. La contrée possède également des mines d’argent,de cobalt et de nickel, d’importance mineure à moyenne.
Deux grandes maisons impériales ont leurs terres en Sablern : au nord l’antique et illustre maison d’Agle, traditionnel soutien de la Couronne, dont les origines remontent à l’empereur Coron III ; au sud les Terrel de Sablern, branche cadette de la maison de Terrel, qui ont assemblé par héritages puis acquisitions successives un vaste fief. A elles deux, ces maisons possèdent 40 % des terres agricoles. D’autre part, la Généralité d’Isablis possède la plupart des terres environnantes de la ville dans un rayon d’environ deux lieues, qu’elle fait exploiter en métayages. Le reste est réparti en propriétés indépendantes appartenant parfois à des organisations cléricales ou similaires, le plus souvent à des familles d’exploitants qui vivent et travaillent le plus souvent sur place. C’est notamment le cas des exploitations viticoles situées sur les coteaux le long du fleuve Undine, dont la production est mondialement réputée.
Le coeur du Sablern est sa magnifique capitale : Isablis, où se trouvent quelques-uns des plus beaux temples du monde, notamment celui de la Visitation d’Isis, celui de Râ Maestos, l’Undini Bloccario de Gond & Straasha, ou le Hiérakos d’Horus. C’est le centre administratif, culturel, politique et militaire du Principat.
La Curie provinciale, parlement de Sablern, s’y réunit, regroupant toutes les familles d’hommes libres, c’est à dire en fait tout le monde, pour discuter des lois fiscales, de la sécurité de la province, et de questions importantes. La Curie citadine est réservée aux seuls habitants de la ville payant des impôts. Elle élit la Généralité d’Isablis, sorte de commune qui assure l’administration de la cité, veille au respect des ressources publiques, au développement économique de la ville, à l’entretien des infrastructures et aux principaux besoins sociaux. Le Duc d’Agle, le Comte de Terrel, le Gouverneur de S.M. Impériale, un député de la Généralité et de la Curie provinciale forment le Conseil du Principat, qui détient l’exécutif. Concrètement, les décisions militaires, la police et la trésorerie relèvent du Gouverneur, la justice est exercée par le comte ou le duc, les lois sont promulguées par le député de la Curie provinciale et le député de la Généralité s’occupe de la fiscalité.
Cité de Newerton(Middle Empire, Empire Naëmbolt) |
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Newerton est une ville au centre de l’Empire et elle se surnomme d’ailleurs ainsi : le centre de l’Empire. Située à l’extrême est des terres des fiefs de Terrel, dont la maison est co-titulaire de la cité de concert avec la Couronne, elle est au coeur de la région du Middle Empire et le point de passage nodal entre orient et occident.
La ville est fondée en 4501 par l’empereur Coron IV, septième souverain Naëmbolt. Elle est ainsi, parmi les grandes cités de l’Empire, l’une des plus récentes. Elle fut conçue d’emblée en fonction de son rôle particulier de poste central et routier entre Angwäven et l’orient d’un côté, Enfurt et l’occident de l’autre. La forme continentale de Derenworld, relayée par l’influence de l’I.T.G., fait que le long voyage y est beaucoup plus ordinaire que dans d’autres mondes, ce qui a entraîné le développement extensif des caravanes, qui réduisent les coûts et accroissent la sécurité du transport.
A l’origine, Newerton était aussi conçu comme un croisement sur l’axe nord-sud allant de Narzad, la capitale des Naugs, au Kelnoreland, qui n’était alors pas submergé : c’est ce qu’expriment ses armoiries octroyées par Coron IV. La ville reçoit aujourd’hui encore l’essentiel des produits des Naugs et des habitants des Barriers, principalement minerais, pierres et métaux.
Newerton a subi de nombreuses invasions venus de Great Anarchy et a été plusieurs fois prises et en ruines. Elle fut un important centre de la Great Evil Coalition, le général Holghing y ayant établi son quartier général. Le 1er régiment de la XIIIe légion y a son cantonnement.
Elle est située dans une plaine et consiste en un cercle fortifié entre quatre quadrilatères constitués par les quatre vastes caravanserais qui l’entourent à chaque point cardinal. Le choix du site a été déterminé par la présence de nombreuses sources et d’une énorme nappe phréatique facilement accessible.
Tout y est conçu pour le voyageur. La ville comporte pas moins de dix huit temples différents dont des temples majeurs de Geb, Diancecht, Oghma, Hermès, Bes, Moradin, Heimdall, Thoth et Tyr et dix chapelles ou autels situés dans le Saint-Quartier, au sud. Dans ce même quartier se trouve un Monastère des White Monks et un hôtel des Blue Monks ainsi qu’une Maison des Druides et des Bardes.
Le quartier du Levant, le plus vaste de tous, occupe le tiers oriental de la ville. Ils abrite la Caisse Centrale des Taxes Impériales et les Archives Administratives Centrales, dans de véritables immeubles de quatre étages bâtis sous le règne de Kermegg II, ainsi que le service central des poids et mesures, doté d’un beffroi à horloge. Plus de cinquante banques, compagnies financières ou de transport ou d’assurances y sont également établis, ce qui est exceptionnel (seules Zevjapuhr, Avros et Ilnaëmb en ont davantage). On y trouve encore le vaste bâtiment de l’Echange de Newerton, qui peut réunir plus de mille marchands (mais de nombreux marchés sont tenus hors les murs, dans les caravanserais). Ce quartier propose également près de 60 auberges ou tavernes, 10 entrepôts fortifiés, 28 établissements de jeu et autres plaisirs, 12 maisons de guildes et corporations, 8 écoles de magie dont un service de l’Aurora implanté au sein de celle de Bakor ainsi que les Postes Impériales.
Au nord, le quartier du Caldro abrite l’artisanat et les marchés locaux ainsi que le fameux hôpital de Mithra, d’une capacité de huit cent malades et qui possède une branche vétérinaire. Cet hôpital est ouvert à tous.
Le quartier d’Apollonia, à l’ouest, est celui des résidences. On y trouve également deux théâtres et plusieurs établissements d’enseignement.
Enfin, sur la colline centrale du Coronsmark, se trouve le château des Terrel qui sert aussi de mairie, de cour de justice, et de prison, et le château de l’Empereur qui sert aussi de lieu de garnison, de trésorerie, de centre administratif et héberge également la Questure Impériale.
Les quatre caravanserai sont propriété de la ville qui les gère pour le compte de la Couronne ; ils font sa fortune. Le Caravanserai Nord est réservé au trafic à destination ou au départ de Newerton. Les trois autres abritent les caravanes selon leur provenance. Chaque journée voit plusieurs départs ou arrivées car ce n’est pas seulement le trafic est-ouest interne à l’Empire mais encore celui du continent tout entier qui passe par Newerton : on y vient d’Arkandahr, de Thûzzland, de Dere, de Farxel, de Mulgorge, d’Evriand, de Marn, de Tangut, de Vizan, de Wejlar et même de Great Anarchy, d’Avros ou de Bervikelt, et inversement. L’ensemble des écuries de la ville et des caravanserai peut abriter plus de deux mille chevaux ou animaux de trait. La ville dispose de six cent fiacres et convoyeurs. Sa guilde de voleurs est l’une des plus disciplinées qui soit.
La ville est considérée comme Sainte de Geb, dieu des marcheurs et voyageurs. Elle accueille toutes races et toutes religions. Elle est toutefois nettement séparée en deux parties. La Newerton « externe » comprend le Saint-Quartier, le Levant, et les caravanserais ; elle est peuplée de voyageurs, de gens de passage ou de personnes qui travaillent pour un temps limité ou des métiers ou missions précis.
Au contraire, Appolonia, le Coronsmark et le Caldro hébergent les « vrais » newertonians, les habitants sédentaires de la ville, qui ne sont ni de passage ni venus pour une raison particulière ou professionnelle. Ces newertonians demeurent entre eux et il est très difficile à un voyageur d’être inséré dans leur société. Il n’y a là aucune xénophobie mais un simple phénomène de saturation historique : les newertonians sont depuis des siècles accoutumés à « voir défiler tout l’empire sous leurs fenêtres » comme ils disent. Ils y sont d’ailleurs très favorables, d’autant que le métier ou la richesse de nombre d’entre eux en dépend. Un newertonian est ainsi éduqué dès l’enfance à se montrer ouvert et tolérant. Mais les newertonians sont culturellement des gens de mesure qui prônent l’équilibre en tout : entre l’ouest et l’est, entre richesse et pauvreté, entre libertés et devoirs. Ils se voient comme une sorte de ciment unificateur de l’Empire, le confluent où se mélangent ses (très) diverses composantes. Et pour cela, il leur faut être eux-mêmes. Il ne faut surtout pas donner l’impression à quiconque : nain, elfe, hobbit, oriental, occidental, nordique, méridional, riche marchand, simple pèlerin, garde convoyeur, homme d’armes, négociant spéculateur, qu’il serait ici chez lui. Newerton doit accueillir autant qu’incarner l’Empire, à la fois riche de ses diversités et supérieur à elles.
D’autant que Newerton est chargée d’un rôle de filtrage et de mise en ordre. C’est là que les marchandises sont inspectées afin de vérifier si elles sont en règle. C’est là que les denrées avariées, les hommes et les bêtes malades, les cargaisons de contrebande sont repérés. C’est là qu’on répare les hommes les bêtes et les chariots, pour reprendre un dicton local. C’est là que les maisons financières compensent leurs effets de commerce, que les maisons d’assurance envoient leurs détectives, que les impôts sont comptabilisés, que les archives sont enregistrées. Newerton est une sorte de douane intérieure, à la fois pour la couronne et pour les intérêts privés. Le coeur au sens de l’organe : une pompe, du commerce interne de l’Empire Naëmbolt.
On peut enfin noter qu’il existe une sorte d’obsession de la propreté à Newerton : être sale c’est être un voyageur qui subit son voyage. La population des newertonians est l’une des seules de l’intérieur des terres pour laquelle se laver quotidiennement est un geste devenu naturel. La ville est nettoyée tous les jours, les rues et routes sont bien entretenues et presque toutes dallées, de nombreuses fontaines ou pompes sont à la disposition de tous. Les newertonians sont également des pionniers de l’hygiène dentaire en Empire, ayant fait collaborer des cultivateurs, des nains et des savants de diverses origines dans l’élaboration d’une poudre dentifrice devenue si populaire qu’elle est communément appelée poudre de Newerton.
Le Middle Empire est un territoire de paysans et ceux de sa partie orientale, où est située Newerton, sont particulièrement attachés à la terre, qui est pour eux source et destination de toute vie. Les cultes de Nepthys, Demeter, Hadès, Frigga ou Silvanus y sont particulièrement répandus. La vocation de lieu de passage du territoire fait que les cultes de Geb, Hermès et Oghma y sont également populaires. Il existe également une élévation des vertus de courage et de droiture qui entraîne le culte de Tyr a y avoir une forte influence.
L’agriculture y est diversifiée et polyvalente sur des sols de fertilité moyenne. L’activité agricole de la région de Newerton est entièrement tournée vers se nourrir, nourrir les voyageurs, stocker les surplus en prévision de mauvais jours. Une semence locale offre toutefois un blé particulièrement fin et goûteux qui produit un pain blanc (Angelbread ou Jilbread) vendu assez cher mais exquis. Les volailles de Newerton sont également fort réputées et la dégustation d’une belle poularde aux truffes un moment très sérieux.
Cité de Manzaïr(Gwenderesh, Soshan, Vizan) |
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Manzaïr ou la douceur de vivre. Ville au climat très chaud au bord du lac Ghôzkal et du fleuve Gwendjeh, où tout pousse à foison. Un des nombreux dictons énonce qu’il suffit de se mettre sous un manguier et d’attendre que le fruit tombe. Palmiers, tamariniers, rosiers de toutes sortes, bougainvilliers, citronniers : une foison d’arbres et de fleurs émaillent cette cité construite en étages et terrasses au dessus de son lac. Au bas de la ville, son coeur, se trouve le port fluvial. Les ressources abondent et le prix du poisson est particulièrement bas. Se nourrir à Manzaïr semble d’une telle facilité qu’elle a la (fausse) réputation d’être la ville où personne n’est jamais mort de faim. Mais il est vrai que si l’on est pauvre, autant l’être à Manzaïr car pratiquement tout le monde y pourra gagner de quoi manger deux oignons, une galette, un poisson et une mangue près d’une des fontaines publiques. On dit encore qu’à Manzaïr les filles sont comme la vie : jolies et faciles.
La ville a été fondée probablement au XXVIIIème siècle par ce qui était alors la plus lointaine excursion vers l’ouest des Zahires, qui y arrivèrent par la mer en remontant le fleuve. Ce dernier est eau profond et peu chargé d’alluvions ; ses rives proposent en prime de belles plages, des arbres fruitiers à profusion, du bois imputrescible à proximité. Les Zahires établirent sur la rive nord un campement de bûcherons destinés à prélever du teck destiné aux navires, qu’on ferait ensuite descendre par le fleuve. Ces bûcherons découvrirent assez rapidement des ruches d’abeilles géantes qui firent un temps la célébrité de l’endroit et sont à l’origine de ses armoiries.
Manzaïr donna lieu à l’apparition de nombreux hameaux de mariniers et de pêcheurs avant de devenir une ville qui prospéra grâce au développement de Zevjapuhr, à qui elle fournit toutes sortes de denrées, que Zevjapuhr réexpédiait vers l’intérieur du continent. Autour d’elle s’est construit un réseau de villages lacustres et fluviaux, de hameaux ou de grandes propriétés foncières dans les terres. Le sucre, le miel d’abeilles géantes, la soie, les teintures ou les épices rares de la jungle, les arbres à pain, le maïs, l’olivier, les agrumes, le café, le cacao, le cocotier, l’arachide, le teck, l’eucalyptus… On n’en finirait pas d’énumérer tout ce qui pousse si facilement autour de Manzaïr et qui est si rare ailleurs.
Grâce au commerce, la ville s’agrandit en gagnant les collines qui surplombent le lac où se construisirent des maisons puis des villas puis des palais, toutes et tous dotés de terrasses et jardins donnant sur le lac. Il y a ainsi deux Manzaïr : une pauvre de la ville basse, qui vit dans des maisons enchevêtrées le long de la rive, et une aristocratique des belles demeures de la ville haute.
A partir du XLVIe siècle, le développement de la cité portuaire d’Accranne (ou Accran ou Ak’rahn) préempta le commerce avec Zevjapuhr, handicapant fortement celui de Manzaïr qui fut sauvé en se redirigeant vers l’intérieur du Vizan, c’est-à-dire en remontant le fleuve au lieu de le descendre. La détestation entre les deux villes est légendaire depuis cette époque. Cette redirection du commerce accrut à l’inverse la fortune de la ville de Kin Rajir, au nord, qui entretient d’excellentes relations avec Manzaïr. En 4807, après des siècles d’escarmouches plus ou moins sanglantes, une guerre éclata entre Accranne et Manzaïr, qui se solda par une victoire écrasante des Accranis sur mer puis sur terre. Le pillage de la ville fut toutefois évité grâce à l’intervention du Calife Zoldamar de Vizan qui ordonna la construction d’une route entre Accranne et Manzaïr, aux frais de la seconde qui fut aussi obligée de faire passer par la première la majorité de ses exportations maritimes.
La famille Donaria détient depuis des temps immémoriaux le titre de Rajah de Manzaïr et de « souverains » du Gwenderesh, la région qui l’environne. Leur règle est exceptionnellement débonnaire par rapport aux standards de Vizan. L’actuel rajah, Bushenaur VIII, est ouvertement bisexuel et profondément libéral, y compris sur la circulation de toutes sortes de drogues aphrodisiaques ou hallucinogènes. L’esclavage y est très encadré : il est par exemple interdit d’infliger des sévices corporels graves à un esclave et la propriété d’un esclave ne s’étend pas à sa descendance, l’esclave possède des droits personnels de propriété, et le propriétaire de l’esclave doit lui assurer gîte et couvert ou bien lui payer un salaire dont le minimum est fixé par le Rajah.
De même, le trithéisme officiel admet certains cultes, notamment les « élémentalistes » : Silvanus, Straasha, Kakatal, Poséido.
Cependant la vie est nettement moins rose dans les villages et les grandes propriétés des alentours, qui appartiennent le plus souvent à un Patricien ayant délégué ses fonctions à des exécutants locaux bien moins accommodants que le citadin moyen. Seuls les villages le long du fleuve, en aval comme en amont, qui échangent directement et fréquemment avec la ville, échappent aux duretés dont ces intendants sont coutumiers.
Le climat est extrêmement chaud (la ville est la plus méridionale de la moitié ouest du continent) amène la plupart de la population à cesser toute activité, surtout en été, dans les quatre heures du zénith. La sieste de mi-journée est une pratique universelle. Les manzaïris vivent donc le soir et parfois la nuit. Une importante activité apicole produit à cet effet de la cire (et du miel) ; des roseaux, joncs et arachides particulières sont aussi cultivés sur la rive sud du lac pour fabriquer des chandelles.
Les pluies sont fréquentes, en particulier à l’automne, avec des précipitations qui peuvent durer plusieurs jours. Le pire problème de Manzaïr vient de périodiques infestations d’insectes, face à quoi les recours à des mages spécialisés est fréquent. Ceci explique la présence d’immenses colonies de chauve-souris car ces prédatrices d’insectes y sont très appréciées et ont le statut de créatures protégées.
La société est organisée en castes :
Patriciens, prêtres, capitaines de transport ou de pêche, savants forment la caste suprême. Ils ont seuls droit d’audience du Rajah et exercent en son nom le gouvernement, votent les lois, fixent certains impôts. Ils se réunissent régulièrement en assemblée des Patriciens qui nomme, pour deux ans, les principaux caciques (exécutifs) de la ville, y compris ses magistrats.
Artisans, artistes, mages, commerçants, cultivateurs, guerriers et chasseurs, premiers matelots forment la caste supérieure.
Ils ont une propriété et le droit (et pour certains le devoir) de porter des armes. Ils ont le droit de s’assembler en guildes ou corporations exerçant leur propre justice. Celles-ci peuvent opposer un veto aux décisions d’un cacique et jouissent d’une faculté de supplier le Rajah de déposer un cacique.
Ouvriers, employés, apprentis, étudiants forment la caste intermédiaire. Ils sont titulaires d’un emploi fixe d’une durée d’au moins un an. Ils ne peuvent recevoir d’ordre de quiconque hors leur patron, leur famille, les autorités ou le Rajah. Ils ont le droit de s’établir dans la ville, d’agir en justice, de changer de caste. Ils peuvent obtenir le secours ou la protection de la ville en cas de grave malheur, de calamité ou de guerre.
La caste inférieure est dite celle des Journaliers. Elle comprend tout non-membre d’une autre caste qui conserve sa libert. Ils sont tolérés et ne peuvent être frappés. Ils sont libres d’aller où ils le désirent. Ils peuvent demeurer dans la ville à l’invitation ou sur la garantie d’un membre d’une caste supérieure, qui doit être renouvelée annuellement. Ils n’ont pas le droit de justice sans être appuyé d’un membre d’une autre caste. Ils peuvent devenir membre de la caste des Ouvriers.
Enfin, au plus bas, la caste des Esclaves. Ils ne sont pas propriétaires de leur liberté. Ils peuvent cependant être affranchis ou n’être esclave qu’à titre temporaire, par contrat ou par sanction. Un esclave affranchi peut devenir de n’importe quelle caste supérieure sauf Patricien dès son affranchissement. Un esclave temporaire revient ensuite à la caste dont il était auparavant membre.
Il existe de très nombreux orcs et demi-orcs autour de Manzaïr qui se nourrissaient des ressources du lac avant d’en être chassés par les humains. Après des siècles de guérillas, humains et orcs ont fini par s’accepter les uns les autres grâce à une guerre commune victorieusement menée contre les yuanti au cours du cinquante et unième siècle ; une importante société d’orcs et demi-orcs est désormais bien intégrée dans le Gwenderesh, au point que plusieurs appartiennent à la caste des Patriciens. Près de la moitié des pêcheurs sur le Ghozkal sont également orcs ou demi-orcs. Une des particularités des orcs du Gwenderesh consiste en leur propension au maquillage ; ayant compris que les humains les trouvaient laids mais ne voulant pas pour autant leur ressembler tout en se différenciant des orcs « sauvages », orcs et demi-orcs « civilisés » eurent recours à toutes formes de cosmétiques et en premier aux colorations, rendues d’autant plus faciles par les nombreux pigments végétaux de la région, mais aussi tatouages, tresses, voiles, ornements les plus divers, souvent très colorés. Les orcs choisissent des vêtements de couleurs vives et contrastées, souvent conçus pour mettre particulièrement en évidence leurs attributs sexuels, qu’ils soient féminins ou masculins. Le fait est que ça marche et que la sexualité des orcs et orquesses de Gwenderesh est très fantasmée par le reste de la population, non sans de solides et bonnes raisons d’ailleurs.
A part les orcs, on trouve d’importants peuplements hobbits dans les environs qui sont établis sous la protection du Rajah. Il existe également de fortes tribus de minotaures gouvernant des esclaves koboldiques et des bandes d’ogres menés par des ogre-mages ; ces dernières ont pratiquement exterminé les goblinoïdes de la région. Les yuan-tis et les gnolls ont été chassés par les orcs et les humains et ont pratiquement disparu.
A la différence de la plupart des Zahires, une forme de fatalisme et de pacifisme, un goût pour l’harmonie et l’équilibre, un certain côté jouisseur, un respect presque inné du corps de l’autre caractérisent le Gwendiri (habitant de la région). La coexistence entre les diverses castes ainsi que le Rajah est presque un modèle de ce qu’il devrait en être et est pourtant rarement ailleurs dans le pays. Le guerrier gwendiri est souvent d’abord un policier, un explorateur ou un chasseur. Un gwendiri préfère se confronter à la nature ou aux monstres plutôt qu’aux autres hommes. En cas de gros problème, le Rajah est appelé pour qu’on recoure à la magie, sinon à des mercenaires.
Le Gwenderesh fait partie du Soshan, ce sud-ouest du Vizan qui menaça de faire sécession et demeure placé dans l’orbite commerciale mais aussi culturelle de Zevjapuhr. Les trois principales cités du Soshan sont Accran, Rompuhr et Manzaïr. A l’étonnement de beaucoup l’actuel Roi des Rois de Vizan, Yimre, a confirmé ce statut et paraît même l’encourager.