UNE HISTOIRE DE L'EMPIRE NAEMBOLT

(première partie)


Empire Naëmbolt des Humains
Chapitres:  1 | 2 | 3 | 4 | 5 | 6
Maison de Naëmbolt

LA PREMIERE PERIODE IRWINGIENNE

On fait paradoxalement remonter la première période Irwingienne au règne de Coron VI "le Courageux", qui monte sur le trône en 4665, à l'âge de soixante-douze ans. Le nom de cette période est dû au long règne d'Irwin II qui va tenter de reconstruire l'Empire et de le doter d'un système de forteresses et d'un réseau routier aptes à défier les invasions. Mais c'est bien une nouvelle période qui commence dès après l'interminable règne de Cyrus Commander.
Coron VI a dû affronter la plus grande révolte alors jamais intervenue en Empire. Le mécontentement de la population envers les nobles, réputés incapables de les protéger des ravages commis par la All Wizards War, et dont même certains grands ou petits noms ont carrément profité, est extrême. Des nobles de sang impérial mènent la population à de véritables jacqueries notamment dans l'est de l'Empire, jacqueries que Coron VI ne contient que très difficilement. Finalement, l'Empereur de s'attaquer à la racine même du système. C'est pourquoi un coup d'arrêt qui sera un coup mortel est porté au système féodal classique. Sous l'influence de conseillers talentueux, Coron VI promulgue l'Edit de Limitation des Droits Féodaux et adopte des pans entiers des Lois de Kelnore (alors seulement en vigueur dans les territoires épargnés par la Submersion et ralliés à l'Empire du Southern Kelnore). Ces lois garantissent à tout citoyen de l'Empire un minimum de droits inaliénables envers quiconque, y compris son seigneur ou suzerain, et renforcent le pouvoir judiciaire de la Couronne en dernier ressort. C'est un coup de tonnerre et les nobles, au premier rang desquels les cousins directs de l'Empereur, forment en réaction la Ligue des Seigneurs qui va fomenter pas moins de quatre tentatives contre Coron VI: un assassinat, une déposition, une révolution de palais, une révolte généralisée dans les campagnes aux allures de guerre civile. Et pourtant, à chaque fois, le vieillard couronné va en réchapper. C'est essentiellement l'Ordre des Paladins de l'Empire quijoue alors le rôle de ciment entre l'Etat et le peuple,réprime la révolte des populations et la colère des nobles et finalement protége la Monarchie qui sortira gagnante de ce duel de trois ans.
Sur sa lancée, Coron VI entame un processus de démocratisation et de centralisation de l'Empire qui semble viser à la destruction du pouvoir nobiliaire, manifestement inspiré par les préceptes avrossians et kelnoreans. Il a le temps d'innover en créant les Procureurs Impériaux, chargés de représenter l'intérêt de l'Etat dans toute affaire de justice en cours dans le pays, embryon des futurs Questeurs et Gouverneurs qui assureront que la Loi soit la même pour tous. Mais la mort l'empêche de mener à bien cette politique et son successeur, Meredith Ier, lui aussi fort âgé, préfère jouer le statu quo afin de calmer un pays agité et meurtri par des conflits autant extérieurs qu'intérieurs.

Meredith Ier "Old Father" a près de soixante ans lorsqu'il devient Empereur. Ce nouveau vieux, ainsi que les nobles le raillent, auquel une longue barbe et de longs cheveux tout blancs et raides donnent une physionomie bien particulière, se consacrera surtout à renforcer le rôle de la toute nouvelle Académie de Bakor afin d'assurer que les ravages de la All wizards War ne puissent plus jamais se reproduire. C'est sous le règne de Meredith Ier qu'il est décidé par la Couronne que doit s'achever le temps des troubles, le temps des guerres toujours inutiles, le temps des morts et des arrogances. Il faut en terminer avec les conquêtes et les dissensions estime l'Empereur, un homme doux et paisible. Et toute son action a ainsi pour unique but l'apaisement et la paix ce qui en fera un des empereurs les plus aimés du peuple et dont le souvenir, jusqu'à ce jour, demeure extraordinairement positif. De fait, cette idée toute simple, mais unique politique et fil conducteur du règne, met fin à la vocation tumultueuse qui a prévalu jusqu'à présent dans l'histoire de l'Empire. Cependant, "Old Father" Meredith ne règne guère longtemps, juste assez pour, à son image, n'avoir accompli que le travail de régner sagement, de devenir un exemple, et de parfois donner l'impression de s'être bien amusé de tant d'agitation pour si peu.

C'est donc à Irwin II "le Béni" qu'il revient de reconstruire concrètement le pays. Le jeune empereur est dès son avènement soumis aux pressions des nobles qui demandent l'abrogation de l'Edit de Limitation et c'est exactement le contraire que décide Irwin qui rédige un Edit d'Ampliation, en fait une confirmation des Lois Kelnoreanes, moyennant quelques adaptations à des cas particuliers de l'Empire.
L'oeuvre d'Irwin II est essentiellement une reconstruction en termes de fortifications, d'ouvrages d'art, de châteaux, routes, ponts, de forteresses. Au début de son règne, il doit cependant constater l'échec de ses amis de l'Ordre des Paladins qui ont tenté sans succès des expéditions contre les Drows. Peut-être est-ce là que l'Empereur, au contact de peuples souterrains, donc de Nains, a contracté ce goût pour l'architecture qui le caractérise tellement aussi bien ce souverain que son règne. C'est Irwin II qui fonde un château impérial sur le site d'Ilnaëmb et ainsi débute la prospérité de ce qui deviendra plus tard la capitale de l'Empire. Il fait restaurer et agrandir le Palais Impérial d'Orfajaz, dessiner et contruire le Palais d'Hiver à Isablis avant de décorer la ville de nombreuses euvres d'art, et c'est aussi lui qui fait établir les célèbres plans secrets des trois forteresses imprenables avec la collaboration de nombreux architectes, maçons et ingénieurs Naugs. Il fait édifier la première, à Durfalls sous la forme d'une modification de la ville. Ses successeurs auront toujours à coeur d'achever les deux autres, Broke et Nordgaard dont il pose la première pierre. Passionné de théâtre, de musique et de chant, Irwin II est également comanditaire de nombreux théâtres dont le plus célèbre aux portes de sa nouvelle résidence: l'Irwingian Theater d'Ilnaëmb. Il tient par ailleurs prudemment son pays à l'écart de toutes les aventures ou séismes qui peuvent affliger le continent et c'est ainsi qu'il n'intervient ni à propos de la dissolution et de l'émiettement de l'Empire de Tangut à l'est, ni dans les guerres entre Marn, Portown ou Ithyl qui, à l'ouest, agitent ce qui furent les terres du Grand Wejlar. Cependant, tout à son oeuvre de reconstruction, il ne peut prévoir ni empêcher la Grande Famine de 4699 de ravager son pays et laisse à sa mort un Etat considérablement endetté.

Lewin Ier aura pour but unique de poursuivre l'oeuvre de son père mais cette fois sans s'engager dans de grands travaux. Patient administrateur, il parvient à reconstituer les finances de la Couronne et sous son règne la stabilité sociale et économique revient en Empire. Ses détracteurs le disent chef comptable, monarque boutiquer, cuisinier de finances. Lewin II ne paie peut-être pas de mine mais il instaure le Mint Impérial, interdisant à quiconque sauf l'Empereur de battre monnaie. Il faut admettre que son règne, au service des marchands et des artisans, influencera beaucoup de futurs nobles et empereurs. On parlera, par exagération, de lewinisme pour caractériser un certain style de gouvernement où la pièce d'or occupe l'essentiel des esprits. Mais c'est à cet homme simple et économe, père affectueux et dévoué, juge impartial et attentif, que des guildes comme les Undine Rivermen, l'Union d'Orfajaz ou la Corteda d'Anequere doivent beaucoup. De ce monarque humble et travailleur, la plus grande gloire fut de préparer le règne de son fils: ce n'est pas négligeable et les plus grands règnes ne sont pas toujours les plus brillants.

Namrodd Ier "le Constructeur" est un des plus célèbres empereurs pour son action interne, ou ainsi le présente-t-on. En apparence pourtant, il se borne à copier ce que son grand-père Irwin II et son père Lewin Ier ont fait de mieux. Mais surtout, cet empereur tolérant s'entoure admirablement de conseillers de toutes origines et même de toutes races dès le début de son règne. Un véritable boom économique s'ensuit, peut-être plus par l'action de son père ou la chance que par de nouvelles décisions et l'Empire ouvre son commerce et son artisanat au continent entier. Ainsi, les Conseillers de Namrodd peuvent-ils s'attaquer à ce qui est un mal endémique de la Couronne Naëmbolt depuis plus d'un siècle et demi, depuis le règne de Coron V: l'endettement de l'Etat. Au début du règne, les dettes de la Couronne s'élèvent à cinq fois le produit annuel des recettes brutes fiscales, c'est-à-dire avant dépenses. A la fin du règne, l'Empire ne devra plus rien à ses créanciers. L'opposition des nobles est ainsi matée car devant l'afflux d'argent, les impôts baissent en taux tout en augmentant en quantité. Du coup, c'est en douceur que Namrodd brise définitivement la structure des maisons nobles héritières de la famille Naëmbolt en répartissant les grands domaines entre branches cadettes et aînées, en favorisant le dépècement et l'émiettement des grands fiefs. Namrodd promulgue ensuite coup sur coup la charte des Villes d'Empire puis la charte des Guildes d'Empire, qui créent des privilèges commerciaux et juridiques très attirants, les édits organisant les corps des Gouverneurs, des Questeurs, de la Haute Cour de Justice Impériale, de la Grand' Chambre des Comptes, de la Cour des Poids et Mesures, de la Sénéchaussée des Routes, Ponts et Voies.C'est une généralisation et une amélioration de la voie ouverte par Lewin Ier.
De partout sur le continent, des immigrants viennent alors s'installer en Empire, fuyant parfois les guerres, ou plus simplement attirés par un pays où les droits de chacun sont garantis, où le droit et les lois sont définies, claires et souples, où une armée protège les terres et les villes contre les envahisseurs, où la liberté du commerce et de l'entreprise est assurée, y apportant leur savoir, leur travail et leur talent. Cependant, et c'est là une de ses grandes décisions, Namrodd Ier est l'Empereur qui rompt officiellement avec la Doctrine de Valerus; c'est lui qui abandonne le racisme anti-elfe, l'impérialisme, l'arrogance typiquement Naëmbolt. Namrodd est peut-être l'Empereur des Humains mais c'est surtout un Empereur profondément humain qui aide à implanter les premiers hôpitaux de Diancecht et recoit toutes les races à sa cour. Conformément à la vocation de cette époque, Namrodd fait paver l'intégralité de la Paladiner Road, double l'Undine de la Grand-Dwin Road, reprend la construction de Nordgaard. Mais il meurt assassiné dans des conditions extrêmement mystérieuses, avec sa femme et ses deux fils, dans le Palais même d'Orandreth.

Lewin II s'apprête à monter sur le trône lorsqu'il succombe en quelques jours à une maladie aussi brutale que bizarre ayant pour siège l'oreille droite. Lewin II n'aura régné que dix-huit jours, sans être sacré.
On parle alors d'une étrange malédiction, cette rumeur enfle au point que Couronne reste pour la première fois vacante.

Finalement, Irwin III, second neveu de Namrodd, accepte de gouverner, mais s'établit à Corontown. Irwin III, médiocre à tous points de vue, se terre en réalité dans Corontown et ne la quittera jamais, refusant tout voyage et toute activité diplomatique. Ainsi, il ne sera jamais sacré Roi des Naïgakis ni Stroel Khan ce qui provoquera diverses dissenssions dans l'Empire entre l'est et l'ouest. Ce règne se résume en une simple expédition des affaires courantes au cours duquel les villes et les guildes prennent une importance considérable. Et pourtant, malgré toutes ses précautions, Irwin III meurt assassiné avec toute sa famille, exactement comme son oncle Namrodd. Malgré l'affolement qui règne à la Cour, on parvient cependant à cacher la vérité au peuple car Coron VII, le dernier neveu de Namrodd, accepte de monter immédiatement sur le trône mais exige le secret le plus total sur son avènement.

Coron VII "le Magnifique" retourne régner à Orandreth et se lance à son tour dans une politique de grands travaux, entame l'édification de Broke, et fait construire toutes les routes conçues sous le règne de Namrodd, achevant ainsi la liaison entre l'est et l'ouest de l'Empire. Afin de cimenter l'Empire en son point faible, au centre, il fonde Newerton et Angwäven ainsi que les châteaux qui les environnent.
Le temps de Coron VII est extrêmement brillant. Fêtes et tournois d'Orandreth ou d'ailleurs atteignent à cette époque un faste jusqu'alors réservé aux trônes d'Okhpuhr, Zevjapuhr ou bien sûr Tresa. Très peu de règnes seront aussi splendides et bienheureux. Les peintres et musiciens embellissent sans cesse les demeures impériales dont la magnificence fait l'envie et l'admiration de toutes les cours. On exige des jeunes gens qu'ils soient formés aussi bien aux pratiques de la chose militaire, de la courtoisie chevaleresque, qu'à l'étude des lettres et de l'histoire. Il faut savoir parler trois langues au moins, lire couramment, connaître la géographie de l'Empire, pouvoir disserter sur les modes architecturales ou picturales pour avoir une chance d'être admis à la Cour de l'Empereur. Une véritable splendeur intellectuelle, morale, et culturelle caractérise la noblesse, la haute bourgeoisie et d'une façon générale toute l'aristocratie de cette époque, aristocratie très ouverte et où chacun, selon ses mérites et son travail, pouvait entrer, ou sortir. Les miniatures de Coron VII, le Livre des Heures de la Cour de Coron VII, et de nombreuses oeuvres artistiques témoignent de ce moment de haute civilisation. Sous son règne s'établissent un style théâtral, un style architectural, un style d'ameublement, un style artistique qui sont autant d'apogées de la période irwingienne et que l'on appellera plus tard ainsi. Anquere est embellie, Dilanovia assainie, le port d'Orfajaz agrandi, le Collège de Lightown institué. L'expédition de la Marche d'Arkandahr, au soutien du nouveau royaume de ce nom, connaît une réussite totale qui permet la reconquête de Iolbex et de la Vallée de Frey et semble une sorte de couronnement de cette époque. Vingt-et-unième Empereur, Coron VII peut sans doute avec raison croire qu'une sorte de perfection de l'Empire a été atteinte sous son règne, et s'estimer fier d'avoir formé une jeunesse, une élite, apte à assurer l'avenir et à répandre pour le plus grand nombre les bienfaits et la haute idée qu'il se fait de la civilisation des hommes. Coron VII peut à bon droit se montrer fier de son oeuvre, le digne héritier d'Irwin II, de Namrodd, de Cyrus Commander ou même de Coron III. Héritier ultime: Coron VII ne peut savoir qu'il est le dernier Empereur Naëmbolt en ligne directe.



ESQUISSE DE BILAN

Au moment où va advenir la fin de la première maison de Näembolt, on peut tenter une esquisse de bilan. Depuis 4405, 21 Empereurs se sont succédés sur le trône instauré par Coron Ier. Comment se présente désormais leur oeuvre ?

Le positif l'emporte assurément.
En près de trois siècles, l'Empire s'est imposé comme la puissance centrale, géographiquement mais aussi politiquement, de Derenworld. Avec le Tangut, le Wejlar et le Vizan, (et Avros si l'on y inclut ses Républiques-soeurs) il fait partie des pays les plus étendus et les plus peuplés ete au cours de ces trois siècles, il est avec le Vizan le seul à avoir conservé et même étendu ses terres et sa population. Le Wejlar a été considérablement diminué et confiné au seul extrême nord-ouest du continent, Avros a vu son système exploser et est réduite à elle-même, le Tangut a disparu en tant qu'Etat. Concrètement, Dere est contrainte à un rôle purement défensif, une sorte de réserve disent les méchantes langues. Bientôt, le Farxel va se scinder en deux. L'Empire n'a guère d'autre rival sérieux que le Vizan, guère d'ennemi sérieux que la Great Anarchy. D'ailleurs, l'armée impériale passe sinon pour invincible, du moins pour la meilleure du continent.

Sur le plan intérieur, l'oeuvre des premiers empereurs a permis de conquérir et consolider ce territoire par des lois communes. Le ciment a pris. La Doctrine Impérialiste a en ce sens joué un rôle certain, de même que la structuration de l'Ost en armée, et la création ou l'organisation de corps tels les Paladins de l'Empire, les Gouverneurs et Questeurs ou même la noblesse Naëmbolt. Noblesse Naëmbolt qui a toujours su très heureusement se marier au sens propre comme au sens figuré avec des représentants des notabilités locales, et dont le bilan de gouvernement au plan local est généralement très satisfaisant. Par la suite, l'équipement en grandes infrastructures réalisé pendant la période Irwingienne, et une certaine autonomie accordée aux Guildes et grandes villes ont permis de lancer une économie qui demeurait très dépendante des autres puissances du Continent.

Les méthodes de gouvernement de l'Empire ont innové en ce qu'elles fonctionnent par délégation, aussi bien sur le plan des compétences (Cabinet Ministériel, Corps administratifs) que sur le plan géographique (Gouverneurs, fonctionnaires locaux, délégation de la puissance Royale à la Noblesse, rôle des Conseils de Guildes, de Villes, des Parlements). En ce sens, elles sont originales dans la mesure où ce n'est pas de la noblesse que dépend le monarque (comme en Wejlar, Marn ou Farxel) mais bien la noblesse qui s'est vue titularisée par la Couronne. Ainsi, même si des conflits nombreux ont opposé et opposeront encore la noblesse à la Couronne (qu'il s'agisse de vélléités d'indépendance des nobles ou d'autocratisme du trône), l'Empereur a toujours pour lui le droit de consacrer un contre-pouvoir qu'il pourra opposer à la noblesse, par exemple les Conseils des Guildes, les Parlements, ou le Cabinet Ministériel.


Mais. Mais, l'Empereur, incontestablement, manque de leviers. Il manque de "retours" sur ce qui se passe dans des provinces souvent éloignées dont il ne sait la plupart du temps que ce que lui en rapportent les gouverneurs ou, le plus souvent, les nobles. L'œuvre de Namrodd Ier ne s'est pas encore traduite en faits. Dans la plupart des provinces règne une quasi-omnipotence des nobles ou des potentats locaux qui ne se trouve contrebalancée que par la Justice Impériale laquelle met beaucoup de temps avant de remonter jusqu'au trône. En réalité, l'Empereur n'a guère de contrôle ni d'écho réel sur ce qui se passe dans les provinces éloignées, telles Silverdawn, Nederwood, Eriendel, SunMarch, Gaïko, Stroelyn ou même le Southern Kelnore ou le Sablern. Il existe un vide entre le Cabinet Ministériel et les fonctionnaires ou nobles locaux, vide que l'Empereur passe son temps à combler en se déplaçant de province en province.
Enfin, l'Empire, à l'instar de la plupart des monarchies héréditaires, s'avère extrêmement tributaire de la personnalité et des capacités de l'Empereur.

D'autre part, ni l'édification de quelques forteresses redoutables, voire imprenables, ni l'excellente armée de l'Empereur n'ont pas empêché la population de souffrir de terribles invasions d'origine surnaturelle. Le pays a connu des ravages successifs, des guerres internes, des envahissements monstrueux qui l'ont à plusieurs reprises considérablement affaibli et ont gravement inhibé ses perspectives de développement. Malgré sa vocation universelle envers les humains, l'Empire Naëmbolt est manifestement plus à l'aise dans l'offensive que dans le défensive. Et pourtant, il n'a quasimen jamais assumé quelque rôle de "gendarme" des affaires du Continent, se bornant la plupart du temps à n'intervenir qu'en fonction de ses intérêts propres sinon bien compris. Sur le plan diplomatique, l'activité impériale ne rivalise pas avec Avros, ni même avec Marn ou le Vizan.
D'ailleurs, la Doctrine Impérialiste, si elle a servi de ciment à l'unité impériale, a valu au pays d'inextinguibles inimitiés, au premier rang desquels Dere, le Wejlar, et d'une façon générale tous les Etats elfes ou elphiles. Avros ne porte pas l'Empire dans son coeur, et il en va autant, à un moindre degré, de la plupart de ses ex-soeurs et aussi du Lowenland. A part Marn et l'Arkandahr, l'Empire ne dispose d'aucun allié déclaré. Certes, le Farxel s'est toujours montré un fidèle ami, le Vizan un opportun partenaire, le Thûzzland un bon voisin, mais tout cela n'est en définitive qu'affaire de circonstances.

Les disparités économiques sont considérables et aucun gouvernement n'a été en mesure d'unifier le pays sur ce plan. L'Ouest de l'Empire commerce quatre fois plus avec Marn ou Zevjapuhr qu'avec l'Est de l'Empire où la même situation prévaut avec Avros ou le Farxel.
Malgré les efforts menés par certains empereurs, notamment ceux de la période Irwingienne, l'Empire demeure un pays très en retard au plan intellectuel. Technologiquement autant que culturellement, la pauvreté de l'Empire est ahurissante et la brillance d'Orandreth, d'Isablis ou d'Orfajaz cache mal la réalité d'un pays d'analphabètes, où l'on cultive de fçaon ancestrale des terres mal employées, où l'artisanat végète, où le commerce demeure dépendant de l'étranger et surtout, surtout, où les arts, la philosophie, les sciences et la littérature sont à des siècles de ce que l'on peut observer en Avros, Vizan, Zevjapuhr, Lowenland, et même très inférieurs au niveau moyen du Farxel ou du Wejlar. Malgré les espérances et l'action des derniers empereurs, en particulier Irwin III et Coron VII, il n'est guère de splendeur de Derenworld qui se situe en Empire.

En résumé, l'Empire de Coron VII Naëmbolt est un Etat en devenir à la fois fait et imparfait.


LE TEMPS DES USURPATEURS

Coron VII, à sa mort, laisse trois filles: Inglia, Dandria et Iwinia. Toutes trois sont mariées. Avec la femme, la Couronne de l'Empire ira-t-elle au mari ? Ou bien, les femmes peuvent-elles régner en titre ? Le droit d'aînesse s'impose-t-il aussi à l'ordre féminin ? Sinon, dans quel ordre faut-il rechercher un prétendant: en commençant par le bas ou par le haut de l'arbre généalogique ? La question dynastique explose avec d'autant plus d'acuité qu'elle ne s'est jamais posée jusqu'alors et que ni Namrodd, ni Lewin II, ni Irwin III n'ont laissé de descendance, soit qu'il n'en aient pas eu le temps, soit qu'ils aient péri avec leur famille. Il y a bien un bâtard qui se réclame de Lewin II, et une bourgeoise qui prétend que son enfant trouvé est un fils d'Irwin III qu'il lui aurait confié afin qu'elle le sauve miraculeusement. A cela personne ne prête grande attention.
Tandis que l'on fouille dans les archives et que l'on scrute les écrits de Coron IV Legiste et de Coron II l'Architecte, les trois soeurs parviennent à se mettre d'accord au bénéfice de l'aînée, Inglia qui délègue à son mari, Jan-Karnosz de Maïorl, ses droits à la Couronne. Cette délégation crée tellement de jalousies parmi les nobles de la Cour que d'aucun se tournent vers le présumé bâtard de Lewin II. En effet, puisque la décision d'Inglia édicte que seul un mâle peut régner, c'est donc un mâle de sang Naëmbolt qui doit monter sur le trône et, pensent quelques-uns, à tout prendre on contrôlera mieux un bâtard.
A ce compte-là, répond Coërlon de Seymrande, c'est moi qui suit descendant le plus proche et mâle du dernier empereur, en ligne directe de Meredith Ier. Les Comtes de Naù se récrient car eux affirment descendre en ligne directe de Coron III, le plus grand empereur de tous les temps. Et il y a bien d'autres cousins, neveux, rejetons divers des branches Naëmbolts qui peuvent à un titre ou à un autre tenter de se déclarer légitime héritier de la Couronne...
La confusion est à son comble. La belle Cour de Coron VII s'émiette en partis qui s'entredéchirent lorsque le prétendu bâtard de Lewin II propose de soumettre à des clergés ou à des Mages la question de sa filiation sous la condition que s'il s'avère bien le fils de Lewin II, il soit sur le champ légitimé et couronné. Devant le refus des trois filles de Coron VII il s'autoproclame alors empereur sous le nom de Meriazin Ier, fait fermer le Palais d'Orandreth par ses gardes et met la ville en état de siège.

Immédiatement, les trois quarts des nobles se déclarent contre lui et entrent en insoumission, puis en guerre. Or, Meriazin Ier est un Mage qui a de nombreuses relations parmi ses confrères, notamment de Sudel. Comme il n'est cependant pas question de violer la Convention de Bakor, les Sudelians vont se débrouiller pour (faire) assassiner les uns après les autres, individuellement ou en groupe, les rivaux de Meriazin et jusqu'à deux des trois filles de Coron VII avec époux et enfants. Du coup, Iwinia Naëmbolt, seule survivante, se dépêche de proclamer son fils Empereur à Orfajaz sous le nom de Meredith II. Le Gaïko le reconnaît aussitôt pour monarque ainsi que les maisons d'Arwen, d'Oglevern, d'Agle et d'Oakfen. Mais pas les Stroels, ni la plupart des fiefs du Heart ou de Sablern ni les Comtes de Naù qui prêtent au contraire allégeance à Meriazin. Ainsi l'Empire se trouve-t-il de facto menacé de scission entre l'Est et l'Ouest. Cela est d'autant plus regrettable que Meriazin, certes cynique et même assez sanguinaire à l'encontre de ses ennemis, s'avère un Empereur remarquable en ce qui concerne l'administration de l'Etat, ce qui lui vaut maints soutiens auprès de la population. Sur le plan diplomatique, il manoeuvre habilement afin d'éviter que des voisins mal intentionnés profitent du désarroi de l'Empire. Sur le plan intérieur, il obtient les faveurs des villes et des guildes par une politique libérale et coupe les nobles, qui soutiennent majoritairement Meredith II, de leur soutien populaire. Mais il ne peut éviter la guerre civile de 4786, année noire de l'Empire. Tandis que Meredith II marche vers le centre du pays, l'armée impériale se divise en deux et s'auto-neutralise. Finalement, Meriazin est défait par les légions de Meredith à Feremskoïe, non loin de Dilanovia. Jetant le masque, il conjure des troupes magiques et attaque avec des sorts, dans une embuscade, l'arrière-garde ennemie, en violation ouverte de la Convention de Bakor. Il a cependant le temps de vaincre à plusieurs reprises et parvient ainsi jusqu'à l'Etat-Major de Meredith II qu'il occit ainsi que sa mère, la dernière fille de Coron VII, et tous les nobles proches d'eux. Meriazin joue ensuite sa dernière carte en cherchant refuge auprès de l'un des Héritiers, probablement Vraxer, le sollicitant puis le suppliant puis lui offrant la moitié de l'Empire en échange d'une intervention contre Bakor. Mais il ne parvient pas à convaincre son interlocuteur et, dès son retour à Orandreth, il attend sa condamnation à mort par les Mages de Bakor. Ceux-ci éxécuteront la sentence quelques jours plus tard, en plein Palais Impérial, devant toute sa cour, dans une scène restée célèbre et immortalisée par plusieurs tableaux et pièces de théâtre. Il faudra longtemps pour que cette primauté du magique sur le politique s'efface en Empire.

Le fils de Meriazin, Atazoen, se proclame aussitôt Empereur tandis qu'à l'autre bout de l'Empire, le prétendu fils d'Irwin III miraculeusement sauvé par une paysanne réapparaît pour en faire autant sous le nom de Valerus III, successeur de Meredith II. Seule règne vraiment l'anarchie la plus totale. Les deux empereurs, épuisant le trésor de l'Etat et contractant des dettes considérables, rassemblent deux vastes armées qui mettent le pays à feu et à sang avant de s'affronter finalement dans une gigantesque bataille à mort, dite bataille des deux empereurs, à Gelkard. C'est une boucherie, une hécatombe. On comptera plus de six mille morts. Parmi eux, Valerus III. Atazoen a gagné, exulte, danse sur les cadavres. Il fait pendre les prisonniers à des gibets sur la route de son retour, un toutes les lieues. Son entourage comprend enfin qu'ils ont affaire à un dément et, trois jours plus tard, Ariam Del Boek, son premier garde du corps, l'assassine. En moins d'un an, quatre empereurs sont morts. Le pays ressemble à un décapité.

Certes, depuis le règne de Cyrus II, le prestige de l'Empire est tel que personne n'a jamais osé s'attaquer à lui. Mais la vacance du pouvoir apparaît tant d'évidence que les convoitises se démasquent. Toute la belle noblesse de la Cour de Coron VII, cette Cour qu'il a voulu un creuset, un vivier de civilisation qui irait ensemencer l'Empire, toute cette Cour et les espoirs dont elle était porteuse gisent avec les morts de cette année terrible. Alan Naëmbolt de Corontown, Nerwig Naëmbolt de Naù, Berwulf Naëmbolt de Sablern, Andetheos Naëmbolt Paladin-Lord of Empire, Heovram et Coronald d'Agle, Bors et Meredith d'Arwen, Humpher d'Atanak, Keox Paladin Dil, Liered et Liopold d'Eriendel, An-Coër de Seymrande, Janke et Jude d'Oglevern, Maudwaith Paladin Glade, Darphen de Nadron, Moldovan de Bergmale ont été tués, ne laissant que des enfants à la tête de la plupart des grandes maisons nobles. L'Empire attend un sauveur et pour ça, on trouve toujours des vocations. Ainsi, déjà de nombreux princes d'autres Couronnes font acte de candidature.

C'est finalement au fils d'Andetheos Naëmbolt, Ariè, qu'échoira, après de nombreuses tractations et négociations, la Couronne. En effet, Coërlon de Seymrande, probalement le plus proche parent survivant de Coron VII, accepte d'adopter la fille unique survivante des enfants de Valerus III et de la marier à Ariè Tolember qu'il tient pour héritier légitime et pour qui il mène en quelque sorte campagne. Coërlon de Seymrande qui a perdu son fils dans la bataille des deux empereurs n'est plus qu'un vieil homme désespéré. Ariè Tolember est un jeune homme qui se destinait à devenir comme son père Paladin d'Empire. Il est le rejeton de la branche cadette de Maudwaith Paladin Glade, le dernier fils de Coron VI et donc le frère cadet de Meredith Ier. Ariè, abandonne donc son prénom avec sa vocation de Paladin et accepte de monter sur le trône pour sauver l'Empire plutôt que pour le reconstruire sous le nom d'Irwin IV.


LA SECONDE PERIODE IRWINGIENNE

En même temps qu'il inaugure une troisième dynastie qu'on appellera la Nouvelle Maison Naëmbolt, le règne d'Irwin IV inaugure la seconde période Irwingienne. Elle est ainsi dénommée non seulement par le fait que la plupart des empereurs de cette époque porteront le nom d'Irwin mais surtout parce que chaque héritier ou empereur ne portant pas le nom d'Irwin se verra généralement assez peu servi par la chance ou la postérité.
Irwin IV, dit "le Moine". C'est un véritable ascète. Renoncant à tous les attributs de l'apparat, il apparaît la plupart du temps vêtu comme un moine, d'une simple robe grise, et seul l'écusson Naëmbolt brodé sur le coeur permet de déceler le monarque dans ce grand type maigre qui déambule sans escorte dans les rues des villes et sur les routes de l'Empire. Irwin IV va partager son règne entre deux affaires: un devoir et une passion.
Il tient pour son devoir d'éradiquer à jamais les germes de la division des nobles et de la Maison de Naëmbolt. Aussi va-t-il mener une politique de répression impitoyable contre tous ceux qui ne se plieront point à l'autorité de la Couronne. Il va se rendre dans tous les fiefs, auprès de toutes les maisons nobles et toutes les administrations pour recevoir personnellement l'hommage de chacun, du plus petit fonctionnaire à l'héritier des plus grands domaines. Protégé seulement par une Garde Paladine qu'il instaure dès les premiers jours de son règne, il sillonne sans relâche le territoire de l'Empire et, s'il se montre peu intéressé par le commerce et médiocre diplomate, il rétablit en revanche une autorité indiscutable et indiscutée sur l'ensemble de son pays. Il échappera à nombre d'attentats et embuscades et il n'est pas interdit de penser que les risques qu'il prend personnellement en se mêlant à la foule ou en déambulant à travers champs et rues n'ont d'autre but que d'attirer précisément à lui les rebelles ou les hommes ou créatures à la solde d'Atazoen ou de Valerus III de façon à les identifier et mieux les combattre ensuite. Homme d'un très grand courage personnel et d'un esprit de sacrifice complet, il attend des autres qu'ils en fassent autant et c'est sans doute pour cette raison qu'il fait édicter ce terrible impôt en 4807 qui frappe le pays tout entier sauf Ilnaëmb.
Ilnaëmb: la ville, mais surtout la passion d'Irwin IV. Puisque son testament interdisait qu'on lui dressât une statue particulière dans la ville d'autre dimensions que celle des autres empereurs, c'est donc hors les murs, entre les Champs Cavaliers et la Porte d'Orient, que les citoyens d'Ilnaëmb reconnaissants ont placé la célèbre et monumentale effigie de leur bienfaiteur. Irwin IV, dès son avènement, entreprit de faire établir une sorte d'expertise d'Orandreth, tant par des Paladins que par les Mages de Bakor mais aussi par toutes sortes de personnes: sages, espions, clercs de la Cour, et braves gens du peuple. Et c'est ainsi qu'il acquit la conviction (et sans doute les preuves) que le Palais Impérial d'Orandreth (aujourd'hui Alten Reïcaër, le Vieux Palais) se trouvait non seulement truffé de passages secrets, souterrains, donjons et pièges de toute sorte, mais surtout sous l'emprise de sortilèges qui avaient permis à Meriazin et à ses Mages-complices, notamment ceux de l'Ecole de Sudel, de mener des actions contre la Couronne. Ainsi s'expliquaient les meurtres et autres disparitions mystérieuses ayant frappé les derniers empereurs de la maison Naëmbolt et leurs proches descendants. Irwin IV, plutôt que d'abattre ou de réaménager tout cela, préféra repartir de zéro, à l'image de ce qu'incarnait son règne. Et s'il choisit Ilnaëmb, c'est certes grâce au site défensif extrêmement favorable qui avait déjà séduit Irwin II au point d'y faire construire une résidence royale, c'est certes dans le but d'affirmer sur des terres qui furent Deranes la définitive présence de l'Empire, mais c'est surtout dans le but de rééquilibrer vers le centre, entre l'Est et l'Ouest du pays, le siège de l'Etat, de créer ainsi une nouvelle route de commerce et une dynamique obligeant les uns et les autres à passer par ce centre, à regarder vers le centre du pays. Ainsi s'implanta une ville nouvelle pour incarner un Empire nouveau, désormais débarrassé des scories du passé.

Les travaux entrepris sont immenses. Des chantiers gigantesques s'ouvrent pour des années et pendant des années l'on verra les longues files de convois apportant les matériaux et la nourriture des travailleurs, on verra affluer de tout l'Empire tous les métiers vers une ville qui surgit de terre. Irwin fait construire les murailles, lance le dragage et le plan des canaux. Il veut une ville où l'eau et les jardins abondent, une ville ou le centre de l'Etat soit irréductiblement protégé, une ville où il soit facile et logique de circuler de commercer, de travailler, une ville où tout un chacun puisse enseigner, apprendre et se distraire, une ville sans influence autre que celle de la Couronne, la ville d'un Empereur au centre de son peuple.
Immédiatement, Ilnaëmb est haïe et jalousée. L'impopularité de l'impôt spécial qui frappe tous les citoyens d'Empire hors les résidents d'Ilnaëmb n'arrange certes pas les choses. C'est donc en faisant face à de véritables tentatives de fronde qu'Irwin IV passe les dernières années de son règne de plus en plus cloîtré dans sa cité chérie et de moins en moins proche de ses sujets et vassaux.
Son second fils hérite du trône, l'aîné, Coron, étant décédé lors d'un accident de chasse quelques années avant son père.

Irwin V a toujours fait un complexe envers son frère et son père. Il tentera toute sa vie de les imiter, de faire mieux que ce qu'a accompli l'un et que ce qu'aurait fait l'autre. En fait, il ne réussit guère qu'à reprendre les défauts du règne d'Irwin IV et reste enfermé dans Ilnaëmb, Orandreth ou Corontown. Dans le même temps, tout à sa tâche, il laisse le Farxel sombrer dans le Schisme. En fait, Irwin V est un médiocre gestionnaire doublé d'un pusillanime en matière de politique extérieure. Mais cette inaction a ses avantages dans la mesure où sur le plan local, les nobles d'un coté, les villes et les guildes de l'autre, prennent coutume de s'entendre indépendamment du pouvoir central. Reste que le règne d'Irwin V est terne à tous points de vue et c'est presque dans l'indifférence générale qu'il s'éteint.


Irwin VI l'Eclairé va être le grand empereur de la nouvelle Maison Naëmbolt, celui dont l'action justifie que l'on parle de seconde période Irwingienne.
Irwin VI a dans sa jeunesse beaucoup voyagé. Il a voulu faire des études universitaires et connaître son pays comme un simple promeneur. Sous des airs timides et réservés, c'est un homme qui réfléchit considérablement. Bien davantage le fils de sa mère que de son père, ce jeune prince déteste les cours renfermées de la Cité d'Ilnaëmb. Il aime le peuple et a été éduqué à son contact. Il également connu les elfes d'Ariandor, vécu un temps à Zevjapuhr et aussi en Avros. En fait, la jeunesse d'Irwin VI donnerait matière à un véritable livre à elle toute seule.
A son avènement, il remet à plat toutes les finances de l'Empire. Son but premier est l'apurement des dettes de l'Etat et l'allègement des impôts. Grand réformateur, ami des marchands, il convoque plusieurs d'entre eux au sein d'un conseil "invisible" dont il tire l'essentiel de ses décisions politiques. C'est un empereur qui hait la guerre et qui s'appuie sur les mages, les clergés, et les marchands. Il apprécie en revanche les voyages et appuiera de toute sa volonté l'I.T.G. alors en état de projet et qui va grâce à son soutien se constituer sous son règne. Il protège ces marchands-voyageurs par des statuts spéciaux assez puissants pour que tous ses voisins soient contraints de l'imiter. En contrepartie, la multiplication des échanges intra-empire se développe considérablement au détriment des importations et exportations. La richesse reste et croît au sein du pays, au lieu de bénéficier et de dépendre de puissances étrangères. Une unification entre les différents territoires de l'Empire s'opère ainsi en douceur, et le coeur de l'Empire bascule judicieusement vers le centre géographique du pays par où passe la majorité des caravanes. Des villes comme Angwäven, Newerton (qu'il refonde entièrement), Dilanovia, Gelkard ou Blumwald, situées sur les grandes routes est-ouest, connaissent un essor considérable qui rejaillit ensuite sur leurs voisines.
En 4853 Irwin VI abolit définitivement le racisme de l'Etat en promulguant l'édit de Tolérance Raciale qui annule les discriminations frappant jusqu'alors les non-humains, c'est à dire surtout les elfes, en Empire. Il organise la Poste Impériale, développe les manufactures d'Etat, les grandes Guildes, crée des universités (Lightown, Ilnaëmb, Biontey), sollicite les artistes et encourage les villes à se doter de franchises et d'assemblées locales. Il protège les artisans, veille à éviter les persécutions fiscales. C'est surtout lui qui structure et assure le pouvoir des Gouverneurs et Questeurs dans les provinces, liant le pouvoir central avec l'administration locale. Les nains ne sont pas oubliés et Irwin VI ira en personne négocier avec leurs chefs des accords de défense et surtout de commerce. Cet excellent gestionnaire rend dès la quinzième année de son règne les caisses de l'Etat excédentaires. Comme cela s'effectue par des opérations sur les fonds d'Etat et non en accroissant les impôts, les nobles assistent avec d'autant plus de contentement à la prospérité impériale qu'Irwin VI développe, à l'instar de Coron VII, une Cour raffinée et itinérante qui se déplace de ville en ville et ainsi visite chaque grand domaine du pays l'un après l'autre. On a calculé que sur ses vingt deux ans de règne, cet empereur n'en aura passé guère que le dixième en sa capitale. Irwin VI est d'ailleurs opposé au principe de la capitale pour un pays aussi vaste que le sien et, parmi les nombreux projets inachevés de cet infatigable réformateur figurait celui de doter l'Empire de quatre résidences impériales, une par saison, avec le plan de création d'une grande flotte marchande et le schéma d'une monarchie constitutionelle dotée d'un suffrage très élargi. Peu d'époques sont aussi heureuses dans l'histoire de l'Empire et le règne d'Irwin VI, sans aucun doute l'un des plus grands empereurs, est souvent comparé à celui de Coron VII le Magnifique.
On peut se demander si Irwin VI ne s'est pas tué à la tâche. Comme la plupart des Naëmbolts, il meurt assez jeune, à l'âge de soixante-quatre ans. Ses funérailles ne furent pas grandioses à sa demande. Mais, spontanément, toutes les villes de l'Empire décrétèrent un deuil de cent jours au lieu des quarante-cinq de la coutume.
Dans un domaine cependant, Irwin VI n'aura pas fait mieux que son père: il ne se préoccupait nullement de politique étrangère, secteur déserté par l'Empire depuis trois règnes lorsque Namrodd II monte sur le trône. C'est donc la politique étrangère qui a fini par s'occuper de l'Empire.

Ceci explique pourquoi Namrodd II "le Malheureux" ne voit rien venir. En bon fils de son père, il s'occupe essentiellement de l'I.T.G. et des finances de l'Etat. Mais il lui manque l'ampleur de vues de son prédécesseur. Pour lui, Derenworld se résume à un monde où la banque et l'argent gouvernent au mieux, où les places financières importent bien plus que les places fortes, où les pays se jugent à l'aune de leur trésor plutôt qu'à celle de leurs qualités intrinsèques. C'est donc dans la plus grande indifférence qu'il laisse le Vizan piller Dere et l'Arkandahr assiéger Ariacandre: abolir l'anti-elfisme est une chose, l'elphilisme en est une autre. De surcroît, le Califat a monnayé comptant la neutralité du Naëmbolt. Pareillement, ni la fin de la République Maritime du Bervikelt, mise à sac par les barbares, ni la guerre entre Okhpuhr et Zevjapuhr ne l'émeuvent outre mesure: le Bervikelt est loin, Zevjapuhr en sortira amoindrie et donc plus réceptive à sa politique; en outre, tout cela affaiblit Avros, redoutable concurrent commercial. Pendant neuf ans, tout va ainsi bien en Empire, tout va même pour le mieux. Les services spéciaux et l'armée sont des paniers percés qui récriminent toujours pour pas grand chose. Depuis un siècle on a la paix: pourquoi cela changerait-il ?
Le 4 Gemini 4872, la Cour d'Ilnaëmb ne s'occupe que du grand bal des seize ans de la Princesse Impériale Alvinia que se disputent ce bellâtre de Joachim d'Agle et ce lourdaud de Raïner Chalkenmoon. On prépare aussi un voyage sur les rives de la Kelnsea et puis la Cour envisage de prendre ses quartiers d'été à Corontown ou pourquoi pas Orfajaz ? Le tonnerre frappe à onze heures du matin: depuis l'avant-veille, une armée de monstres à envahi l'Eriendel dont le roi Talgemund demande à l'Empereur aide et protection conformément à son serment d'allégeance. On apprend le même jour que l'Arkandahr est envahi par le Bervikelt. La stupeur de la Cour serait bien plus grande s'ils savaient que ce n'est là que le début.



CHRONOLOGIE DES EMPEREURS NAEMBOLT : INTERREGNE ET DEBUT DE LA SECONDE MAISON

(changement de ligne = filiation, changement de colonne = cadet ou dynastie)

MERIAZIN I
(4775-4777)
 
 
 
 
 
 
MEREDITH II
(4777-4786)
 
 
 
 
ATAZOEN I
(4786-4786)
 
 
 
 
 
 
VALERUS III
(4786-4786)
 
 
 
 
 
 
IRWIN IV
(4786-4812)
 
 
 
 
 
IRWIN V
(4812-4837)
 
 
 
 
 
IRWIN VI
(4837-4859)
 
 
 
 
 
NAMRODD II
(4859-4878)

 


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